Paris qui s’en va.
Le monde illustré — 22 avril 1865
Après avoir parcouru un frais vallon, à l'ombre de magnifiques peupliers,
la Bièvre se divise en deux branches, à la hauteur du boulevard des Gobelins;
c'est là pour ainsi dire qu'elle fait sa véritable entrée dans Paris. Elle passe
sous le boulevard des Gobelins et reparaît pour prêter ses eaux à une grande
fabrique d'indienne.
A partir de cet endroit jusqu'à la Seine, la rivière devient une véritable
rigole encaissée dans des parois de maçonnerie. Elle est éclusée, élargie, rétrécie,
suivant les besoins; tous les quinze jours on la met à sec pour enlever les
immondices qu'elle charrie ni plus ni moins qu'un des égouts de la ville. Elle
n'a plus de rivière que le nom, et lorsqu'on suit ses bords, derrière les Gobelins
par exemple, on se demande ce que peut être cet horrible ruisseau dont les eaux
puantes sont recouvertes d'une couche d'ordures formant croûte et répandant
une odeur fétide à plusieurs centaines de mètres à la ronde. Tel est l'état
de la Bièvre qui fait la richesse de cent fabriques; on lui pardonne d'être
sale en considération des richesses qu'elle procure, et de sentir mauvais parce
que les gaz ammoniacaux qu'elle dégage, loin d'être insalubres, sont de véritables
préservatifs, en temps d'épidémie, pour la nombreuse population ouvrière qui
vit sur ses bords.
Dans la rue du Champ-de-l'Alouette nous rencontrons la blanchisserie Noiret,
située près de l'emplacement de l'ancien moulin Croulebarbe, dont le régicide
Fieschi fut longtemps le gardien; c'est là que se blanchit le linge des prisons.
En descendant la rue Croulebarbe, on rencontre un grand nombre de mégisseries
et surtout des blanchisseurs de linge. Le lavage se fait en contre-bas de la
rue, dans la Bièvre. Chaque blanchisseur possède sur les bords de la rivière,
enterrés jusqu'au bord, un certain nombre de tonneaux pour lesquels il paye
une redevance à la ville; les lavandières entrent dans ces tonneaux jusqu'à
mi-corps de façon à se trouver bien à portée de l'eau et à éprouver d'autant
moins de fatigue qu'elles n'ont pas à se baisser. Lors- que les ouvrières ne
travaillent pas, les tonneaux sont fermés au moyen de couvercles cadenassés
et ce n'est que dans les cas d'oubli de cette précaution que le public peut
profiter de cette installation.
La mégisserie et la teinturerie des peaux sont les deux industries qui salissent
le plus la rivière; il est incroyable que l'eau puisse encore être utilisée
quand elle a passé derrière deux ou trois de ces fabriques.

Nos dessins de ce jour représentent quelques-uns des principaux établissements
situés sur le ruisseau parisien. A droite de la rue Croulebarbe est la blanchisserie
pour les prisons militaires. Puis un atelier de sciage de peaux : cette industrie
a pour objet de séparer les peaux dans le sens de leur épaisseur et d'en faire
deux avec une. Puis viennent les tanneurs et les mégissiers : les peaux arrivent
là sortant des abattoirs et ne repartent que propres à être livrées au maroquinier,
au gantier ou au cordonnier.

Les grattages de peaux, appelés bourres de laine, sont enlevés de ces usines
et portés dans des ateliers spéciaux pour subir le triage et le lavage; c'est
toujours la Bièvre qui fait les frais de cette seconde opération.
Le triage est opéré par des femmes qui séparent les couleurs et les espèces,
et les bourres triées sont mises dans des mannes que des hommes placent à fleur
d'eau et agitent à l'aide de grands bâtons jusqu'à nettoyage complet.
Il est impossible de donner une idée complète du pittoresque de ces quartiers
; nous engageons nos lecteurs parisiens à les visiter avant qu'ils disparaissent,
persuadé que nous sommes qu'ils ne regretteront pas leur excursion à ces antipodes
du boulevard des Italiens.
A. HERMANT.
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