Lu dans la presse...
Trop de clairons dans le quartier de la Maison-Blanche
Les habitants protestent sans succès
Paris-Soir — 12 avril 1929
Une commission a été constituée aux Arts-et-Métiers pour déterminer quels
sons de trompes d'automobiles étaient indésirables et quels sons pouvaient
être supportés par les tympans parisiens.
Cette commission n'a pas encore rendu son verdict, mais il est à peu près
certain qu'elle repoussera avec une touchante unanimité toute trompe
rappelant le clairon criard où la trompette assourdissante.
Or, tandis que les chauffeurs ne pourront claironner ou trompeter par les
rues de Paris, des escouades de bruiteurs autorisés continueront, embouchure
aux lèvres, leur pas accéléré quotidien dans les rues du quartier de la
Maison-Blanche en général, boulevard Kellermann en particulier.
Oui, les habitants de ce quartier, qui a droit au calme comme les autres,
ont élevé une plainte timide contre les clairons sans pitié de certain
régiment d'infanterie coloniale.
— Dès six heures du matin, me conte un petit épicier de Maison-Blanche
(quelque peu parent avec celui de Montrouge) le vacarme commence. Ce sont,
peu après l'arrivée des bleus, des notes lancées par le « cabot-clairon » et
répétées ensuite par les élèves. Puis toutes les sonneries se succèdent,
jouées dix fois de suite et reprises encore pour les débarrasser des fausses
notes et des couacs dont ces jeunes musiciens sont prodigues. Enfin, la
clique se rapproche. Les élèves-clairons jouent des marches, passent,
s'éloignent, reviennent, tandis que les chiens hurlent et que tous les chats
du quartier font des loopings désespérés.
— Ma clientèle diminue chaque jour, me dit un débitant de vins et
d'apéros du boulevard Kellermann, Vous pensez, avec ces clairons « on ne
s'entend plus causer ». Nous sommes déjà privilégiés pour ce qui est des
bruits sans ces maudits instruments de cuivre. Nous avons les sifflets des
locomotives de la Ceinture, le bruit des manœuvres de trains et le passage,
jour et nuit, d'animaux destinés aux abattoirs voisins. Ça mugit, ça bêle,
ça hennit et, ça grogne. Allez donc dormir avec tout ça et les clairons
par-dessus le marché. On a déjà condamné les fumées de Paris, certains
bruits sont. aussi indésirables.
Les habitants du quartier ont adressé une fort respectueuse protestation
à Qui-de-Droit, mais M. Lebureau militaire leur a courtoisement répondu
qu'il ne pouvait rien contre une décision prise en 1910 et qui, à l'époque,
n'avait soulevé aucune protestation.
Pourtant, il reste encore un espoir aux habitants de Maison-Blanche. Au
ministère de la Guerre, où nous venons d'apporter les doléances de ces
sacrifiés, on nous répond que le mal venant de clairons coloniaux. la
protestation doit être adressée à la direction des troupes coloniales. Une
enquête sera alors ouverte et si la protestation semble justifiée, des
ordres parviendront au colonel commandant le régiment pour que l'école se
fasse ailleurs
Reste à savoir ce que signifie cet « ailleurs ». Souhaitons qu'on entende
par là l'intérieur des casernes ou des bastions.
Morency.
Ailleurs sur Paris-Treizieme
Au numéro 1 de la villa Sainte-Hélène, tout près de la poterne des Peupliers, sur la zone annexée du XIIIè arrondissement, la famille Nesler occupe une baraque de trois pièces, au fond d'un petit terrain clos dont elle est locataire. |
Mettant à profit les loisirs d'un dimanche ensoleillé, près de vingt mille Parisiens ont défilé hier, sous la poterne des Peupliers, pour se rendre compte des dégâts causés par l'accident de samedi soir. |
La poterne des Peupliers, située à l'extrémité de la rue des Peupliers, entre les portes de Gentilly et de Bicêtre, fait partie d'un groupe d'ouvrages militaires se rattachait au système des fortifications de Paris reconstruit en 1889 pour assurer la défense de la vallée de la Bièvre. |
Une chasse à l'ours dans Paris ! Voilà qui sort de la banalité. Ce fait, rare, mais authentique, s'est produit la nuit dernière, avenue des Gobelins. |