Menu haut

SIXIEME ANNÉE N°4513

 

91ème jour de l'année

   


Vendredi
1
Avril 1897

 Le scandale des Folies-Bergère évité - 15 avril 1897

Le scandale
des Folies-Bergère évité

Une indisposition de commande.
Intervention du préfet de police. — Exhibition interdite

Le Gaulois — 15 avril 1897

Le Gaulois avait signalé avec une indignation légitime les débuts prochains, sur la scène des Folies-Bergère, de l'ex-princesse et nos confrères, convaincus comme nous du scandale formidable que cette exhibition devait fatalement soulever, nous avaient emboîté le pas. Notre juste appel a été entendu. La « débutante » ne débutera pas. Nous en sommes un peu la cause et nous nous en félicitons hautement. En cette circonstance, M. Lépine a droit à nos remerciements et nous les lui marchanderons d'autant moins qu'on sait que les fonctionnaires de la république nous donnent rarement l'occasion de les féliciter.

On lira plus loin à la rubrique du « Courrier -des spectacles » la note officielle que le théâtre des Folies-Bergère nous a adressée pour nous faire savoir que l'ex-princesse ne débutait .pas ce soir sur la scène de la rue Richer.

Cette note nous montre la débutante empêchée par un état maladif d'une certaine gravité. Il y est question d'influenza, de fièvre intense, de complication pulmonaire. A la vérité, et fort heureusement pour l'héroïne en cause, sa santé est excellente et les raisons pour lesquelles les amateurs de scandales ne. la verront pas ce soir sont à un ordre-tout à fait différent.. Les voici dans toute leur simplicité.. Hier matin, M. Marchand, directeur des-Folies-Bergère, était appelé chez le préfet de police, qui lui demandait officieusement de renoncera faire débuter celle qui sur l'affiche devait porter le nom de l'ex-princesse.

Le scandale, prétendait le préfet, serait extraordinaire et des renseignements qui lui étaient fournis, il ressortait que la débutante serait huée, qu'une foule de gens s'étaient procurés des sifflets à roulette et qu'on lui jetterait à la face des lapins vivants, des pelures de pommes de terre et d'autres objets innommables.

M. Marchand répondit au préfet qu'il redoutait autant que lui ce scandale et que si la « débutante » consentait à renoncer à ses projets de paraître sur son théâtre,  il s'en montrerait fort heureux pour sa part. D'ailleurs il craignait si fort les manifestations brutales qu'il avait interdit qu'on servit aucune consommation dans la salle et qu'il avait fait supprimer les petits bancs et les lorgnettes automatiques.

— Puisque vous partagez mon avis lui, dit le préfet, voyez l'ex-princesse, et tâchez qu'elle ne soit pas hostile à nos sages projets.

» D'ailleurs, je vais la convoquer pour ce soir, six heures, et je vous prie de revenir à mon cabinet à la même heure. »

Puis, congédiant M. Marchand, le préfet ajouta :

— Allons, je commence à croire que nous parviendrons peut-être à éviter tout scandale.

A six heures précisés, M. Marchand arrivait à l'hôtel du boulevard du Palais, où, depuis un quart d'heure, la débutante l'avait précédé. L'héroïne fut reçue la première. Le préfet fit valoir à ses yeux les motifs les plus sérieux qui devaient la détourner de s’exhiber à la foule. Comme la « débutante » semblait ne pas goûter ces raisons et qu'elle prétendait avoir le droit de débuter, le préfet lui fit comprendre qu'il ne voulait prendre officiellement aucune mesure vexatoire avant la représentation, mais que si celle-ci était scandaleuse, ce qui était absolument certain, il se verrait dans la nécessité cruelle de sévir en fermant le théâtre où elle aurait eu lieu et en invitant peut-être la «débutante » a quitter le territoire français — mesure qu'il la suppliait de ne pas l'obliger à employer.

Puis, très amicalement, très paternellement, M. Lépine insista sur des questions d'ordre privé.

Il fut éloquent et persuasif, car à six heures et demie précises, l'ex-princesse, très émue, renonçait à paraître sur la scène des Folies-Bergère.

Ce début à sensation n'aura donc pas lieu, et le scandale que nous redoutions et qui eût été plus formidable que nul ne peut le soupçonner, est heureusement étouffé.

La Presse a quelquefois du bon !

*
*      *

En quittant l'hôtel du Palais, Mme Clara Ward est rentrée à son hôtel, où à peine installée, elle a reçu la visite d'un médecin, elle n'a pas eu de peine à jouer le rôle de malade qui doit expliquer au public sa décision de ne pas paraître aux Folies, car elle était effectivement souffrante.

Le docteur a indiqué l'ordonnance suivante:
Prendre par jour, en deux ou trois fois, deux à trois cuillers à potage de la potion suivante, diluée dans un verre de tisane de mauve :

    Acétate d'ammoniaque 15 gr
    Alcool de racine d'aconit 30 gouttes
    Sirop de codéine 100 gr.
    Eau de fleurs d'oranger 40 gr.

Mme Clara Ward n'a pas décidé encore si elle resterait à Paris ou si elle repartirait pour Berlin, où des offres brillantes lui sont faites par la Belle-Alliance, un music-hall renommé sur les bords de la Sprée.

Ce que nous savons, c'est qu'aujourd'hui même l'héroïne de ce petit roman doit aller poser chez un de nos grands photographes dans le costume suggestif qu'elle devait endosser aux Folies-Bergère.

Enfin, cette tragédie finit heureusement en opérette Mme Clara Ward renonce au théâtre, en France du moins, et rentre ainsi dans la vie privée. Nous n'avons plus à nous occuper d'elle, et nous espérons bien qu'il en sera toujours ainsi.

Ajoutons que Mme Clara Ward qui s'est sagement abstenue d'envoyer du papier timbré au Gaulois aurait moins sagement décidé d'en adresser à un de nos confrères.

Maubersac

 EFFROYABLE DRAME

EFFROYABLE DRAME

UNE MÈRE TUE SES FILLES ET SE SUICIDE

Après les jours de bonheur — De spéculations en spéculations — La peur de la misère — Les bols empoisonnés — Le père.

Une mère a eut le criminel courage, de donner la mort à ses deux enfants, deux êtres adorés, et elle a bu ensuite ce qui restait de la coupe empoisonnée. Morte aussi, la mère !

Cette femme n'était point du peuple elle appartenait, au contraire, de par son mariage, à la noblesse provinciale. Causes de ce drame douloureux, la peur de la misère, la crainte de la déchéance sociale avec toutes ses conséquences mesquines et offensantes. Cette mère de famille, jeune encore et d'une santé robuste, aurait pu faire comme ses pareilles de la caste inférieure travailler opiniâtrement pour assurer l'existence de ses enfants et celle de son mari, malade mais elle a préféré s'abstraire violemment d'une humanité où l'effort pour vivre, s'il est souvent pénible, est, du moins, toujours méritoire et souvent glorieux.

Faiblesse de corps et lâcheté d'âme, diront sans doute les chroniqueurs qui, demain, épilogueront sur cet événement tragique, à moins qu'ils ne magnifient l'acte insensé de cette mère qui a préféré se débarrasser de ses enfants, puis disparaître elle-même plutôt que de voir le somptueux mobilier qui servait de cadre à sa jeunesse et à sa beauté tomber aux mains avides des brocanteurs.

C'est à Neuilly que le drame s'est déroulé c'est là que nous sommes allés chercher nos renseignements, et voici ce que nous avons appris.

 

Le ménage Huot de Grancourt.

M. Huot de Grancourt, âgé de quarante et un ans, fils d'un riche propriétaire du département du Nord, habitant Lille, épousait, il y a six ans, une jeune fille de treize ans plus jeune que lui, appartenant à une aristocratique famille du pays, et qui lui apportait une dot des plus respectables. Peu auprès, le père de M. de Grancourt décédait, laissant a son fils une fortune évaluée à douze cent mille francs, représentée surtout par des fermes et des terrains à bâtir situés dans les environs de Lille et dans le voisinage de plusieurs autres villes du département du Nord.

Les premières années du ménage furent heureuses, et M. de Grancourt, en 1893, devint père d'une petite fille, qu'il fit baptiser Edmée, et, en d'une autre fillette, à laquelle on donna le prénom de Jeanne. En M. Huot de Grancourt vint à Paris, où il séjourna pendant quelques mois; puis il alla habiter Neuilly, où il avait loué un très confortable appartement, au n° 106 de l'avenue de Neuilly, au quatrième étage d'un somptueux immeuble moderne. Les habitudes de luxe des époux de Grancourt, les difficultés qu'ils rencontraient pour faire rentrer le produit de leurs fermes obligèrent le mari à chercher des ressources ailleurs. M. de Grancourt tenta quelques opérations de Bourse qui lui réussirent, et il réalisa notamment sur les Mines d'or des gains très appréciables. Grisé par ce premier succès, M. de Grancourt s'aboucha avec des hommes d'affaires, dont les manœuvres entraînèrent bientôt sa ruine.

Après avoir vendu, toutes ses propriétés, il s'engagea dans des spéculations qui le laissèrent sans un sou vaillant.

M. de Grancourt et sa famille habitaient Neuilly depuis six mois l'appartement se composait de cinq pièces. et était d'un loyer annuel de quinze cents francs. Quand il quitta Paris, le ménage ne possédait plus que six mille francs. Le trimestre fut payé d'avance, et M. de Grancourt, espérant toujours se relever, essaya avec ce qui lui restait d'argent de refaire sa fortune.

Hélas la chance l'avait complètement abandonné, et M. de Grancourt dut avouer, un beau matin, sa jeune femme qu'il ne lui restait plus rien… rien !...

La malheureuse femme perdit alors complètement la tète. Elle écrivit à toutes ses amies de pension des lettres désespérées; on lui promit de venir à son aide, et, en effet, elle reçut diverses sommes d'argent, qu'elle dépensa pour tenir son train de maison. Elle dépensa même tant et si bien que le terme d'avril arriva et qu'il lui fut impossible de payer le propriétaire.

Une saisie fut opérée, et M. de Grancourt reçut son congé.

 

De l'argent !

A ce moment, la jeune femme s'employa par tous les moyens possibles à trouver de l'argent elle se rendit chez divers amis de la famille et réussit encore à réunir une certaine somme, que le mari risqua dans une spéculation désastreuse.

Pour comble de malheur, M. de Grancourt, sur ces entrefaites, fut pris de douleurs sciatiques et dut garder le lit espérait à ce moment rétablir sa fortune, car il avait été sollicité de prendre la direction d'une importante affaire industrielle. Ce dernier coup du sort désespéra complètement le ménage. Mme de Grancourt persuada à son mari de mourir avec elle; mais; avant, elle se rendit auprès de ses amies afin d'obtenir le placement de ses deux petites filles, dont elle ne rêvait pas encore la mort. On ne lui indiqua que des maisons où le prix de la pension était très élevé. Et l'orgueilleuse mère ne voulut pas avouer quelle n'avait pas d'argent. D'autre part, elle n'aurait jamais consenti à placer ses deux fillettes dans un orphelinat gratuit, elle ne voulait pas qu'Edmée et Jeanne fussent élevées avec des enfants d'ouvriers, qu'elles subissent leur promiscuité !

«J'aime mieux mourir, écrivait-elle, plutôt que mes deux filles soient en proie aux luttes de la vie. » Elle se rendit cependant dans plusieurs établissements où on lui avait promis que ses enfants seraient bien traitées, notamment à l'Enfant-Jésus mais elle ne put se résoudre à accomplir ce sacrifice. Cette fois, elle proposa à son mari de s'asphyxier avec les deux fillettes:

M. de Grancourt temporisa, toujours confiant en l'avenir. Effrayé par les propositions de sa femme, il disait à un ami :

— J'adore Marguerite mais elle-est affolée ; j'ai peur d'un coup de tête. Si j'étais valide, je travaillerais et nous vivrions, modestement sans doute, mais nous vivrions.

Depuis le 15 avril, Mme de Grancourt était dans un état de surexcitation extraordinaire. Elle écrivait à tout le monde, annonçant sa détermination d'en finir avec la vie, et, chaque fois qu'un secours se présentait, elle le refusait, ne voulant pas, disait-elle, accepter d’aumône.

 

Les lettres.

Bref, ce qui devait arriver arriva. Avant-hier soir, Mme Marguerite-Louise de Grancourt s'enferma, vers dix heures et demie, après avoir couché ses enfants, dans son cabinet de toilette, et elle écrivit cinq lettres.

Dans l'une, adressée à son mari, elle disait en substance :

« Pardon, mon pauvre ami mais, après nos efforts pour la lutte, il vaut mieux que nous te quittions tous les trois le fardeau sera moindre. »

Et elle ajoutait : « Nous t'attendons. »

Dans une autre missive, adressée à une amie, elle écrivait :

« Je préfère à la vie horrible qui nous menace, la mort, qui va nous délivrer, mes enfants et moi, des étreintes dé la misère. » Puis, dans une troisième, elle demandait pardon à Dieu et aux hommes d'avoir « assassiné » ses enfants.

Jusqu'à minuit, elle écrivit ainsi. Puis, vers minuit un quart, elle pénétra dans la salle à manger, où dormaient dans leurs berceaux les deux fillettes.

Elle s'avança sur la pointe des pieds, car le père, qui prévoyait le drame et était inerte sur sa couche, surveillait anxieusement la porte de communication.

 

Le drame.

Alors, comme elle faisait tous les soirs, Mme de Grancourt s'approcha d'Edmée, la baisa sur le front et lui demanda, tout bas, bien bas :

— Tu as soif, ma chérie ?

— Oui, maman, répondit l'enfant.

Edmée but et tomba foudroyée sur sa couchette.

La mère venait de lui faire absorber du cyanure potassium.

Puis la mère se dirigea vers le berceau de Jeanne et lui fit également boire le mortel liquide.

Elle embrassa encore une fois les deux petits cadavres, puis absorba elle-même, d'un seul trait, ce qui restait de poison au fond du flacon

Elle poussa un cri terrible et se dirigea, chancelante; vers la chambre à coucher. M. Huot de Grancourt se dressa sur son lit de douleur et vit sa femme s'avancer vers lui, puis s’affaisser, comme une masse sur le parquet, en s'écriant, dans un râle suprême :  — Elles sont mortes !... Je les ai tuées… Pardon !

La bonne, qui couche dans une pièce continue à celle de son maître, ayant entendu le cri d'angoisse de la jeune femme, se précipita dans la chambre à coucher et se trouva en présence d'un terrifiant spectacle.

Sa mairesse était étendue au pied du lit. Une écume blanchâtre floconnait aux commissures de ses lèvres, et M. de Grancourt, les yeux agrandis par l'effroi; était penché vers elle, essayant vainement de se soulever sur sa couche de douleur.

Alors ce fut dans la maison un véritable affolement. La bonne se précipita dans l'escalier et appela au secours. Les voisins accoururent et trouvèrent les enfants morts dans leur barcelonnette et la mère inanimée près du mari paralysé par l'horreur.

 

Les constatations.

La concierge et son fils allèrent prévenir M. Cotillon, commissaire de police, qui arriva accompagné des agents du poste, car dans la rue, malgré l'heure tardive, la foule s'attroupait et voulait forcer la porte de la maison pour pénétrer et voir;

Le magistrat a reçu la déposition de M. Huot de Grancourt. Son récit est celui que nous venons de faire nous-même. Le magistrat a pris les lettres écrites par Mme Marguerite de Grancourt et les a expédiées à leurs adresses, puis il s'est retiré.

Quand il- fut seul, M. de Grancourt, toujours immobilisé sur son lit par son mal, voulut contempler les traits des trois êtres qu'il avait adorés. Des voisins apportèrent dans leurs bras les corps des deux fillettes, et les lèvres du malheureux père longuement restèrent collées au front des enfants Puis les deux petites filles ont été replacées chacune dans son berceau, tout proche de leur mère, étendue sur un lit semé de fleurs printanières. Des cierges ont été allumés, puis M. de Grancourt a prié tout le monde de se retirer, et il est reste seul avec ses chères mortes.

 

Douleur poignante.

Le malheureux mari, que nous avons pu voir hier soir, est dans un état d'abattement tel que l'on craint pour sa raison. Il ne sait plus ce qui s'est passé. Il pleure, et ses sanglots sont coupés à chaque instant par des cris que lui arrache la souffrance.

La bonne, très émotionnée par l'événement, est couchée dans sa chambre voisine et est chargée de surveiller l'infortuné mari afin qu'il n'attente pas à ses jours. Une seule personne s'est rendue, hier après midi, 106, avenue de Neuilly mais, sur les conseils mêmes des voisins, elle n'a pas cru devoir monter.

Ce douloureux événement a produit une grosse émotion à Neuilly.

La famille, qui habite, comme nous l'avons dit, le département du Nord, a été prévenue.

La date des obsèques des trois victimes de cet horrible drame ne sera fixée qu'aujourd'hui.

Le Matin — 2 mai 1897

L'actualité dramatique

 Le drame de la place des Vosges

Le drame de la place des Vosges.

C'est à un sentiment de jalousie rétrospective qu'a obéi M. François Béchet, ouvrier bijoutier, demeurant, rue Saint-Martin, en cherchant à attenter aux jours de M. Louis Portal, courtier en vins, domicilié, 19, place des Vosges.

M. Portal, qui est âgé de trente-cinq ans et est très connu Bercy, où sa profession l'appelle quotidiennement, est marié depuis deux ans environ et père d'un bébé de quelques mois. L'appartement qu'il occupe, place des Vosges, est des plus luxueux; il paie, d'ailleurs, un loyer annuel de six mille francs. Il parait qu'avant de convoler en justes noces, M. Portal aurait entretenu d'intimes relations avec une de ses petites cousines, mariée depuis à M. Béchet. Sa conduite à l'égard de la jeune femme aurait même été des plus incorrectes. Bref, hier matin, vers huit heures, on sonnait fébrilement à la porte de l'appartement de M. Louis Portai. Ce lut la bonne qui vint ouvrir à l'obstiné carillonneur. M. Portal, s'il vous plait, demande le matinal visiteur.

— Monsieur est encore couché, répondit la bonne, et il ne reçoit d'ailleurs personne avant neuf heures. Si vous voulez vous présenter à cette heure-là, monsieur vous recevra.

— Je suis très pressé et ne puis attendre. J'ai une très importante commande à faire et je suis persuadé que, si vous faites part à votre maître du but de ma visite, il me recevra aussitôt.

En même temps le visiteur sortit un portefeuille de sa poche et en tira une carte de visite portant le nom suivant: « François Béchet, ouvrier bijoutier. »

La bonne prit la carte qui lui était tendue et alla prévenir M. Portal. Quelques secondes après, elle revenait, priant M. Béchet d'attendre quelques instants. M. Portal passa à la hâte son pantalon et une jaquette et vint au-devant de son prétendu client.

— Je vous prie de m'excuser, lui dit-il, de vous avoir fait attendre; vous désireriez, m'a-t-on dit, faire, une commande de vins.

— Oui, déclara M. Béchet qui, regardant alors bien en face le négociant en vins, lui dit: « C'est bien à M. Portai lui-même que j'ai l'honneur de parler ? »

— A lui-même, répondit simplement le négociant.

Béchet s'arma alors de son revolver et fit feu à trois reprises sur le courtier en vins M. Portai fut atteint au bras gauche, le second projectile l'effleura au côté droit et la troisième balle ne fit que lui enlever un petit lambeau d'oreille.

M. Portai conserva son sang-froid il courut à sa chambre à coucher et prit son revolver pour riposter à l'agression dont il venait d'être victime. Quand il revint dans son antichambre, François Béchet avait disparu. Dans sa précipitation, celui-ci avait laissé chez le courtier en vins son chapeau et son revolver.

M. Carlier, commissaire de police du quartier de l'Arsenal, prévenu du drame qui venait de se dérouler, se rendit au n° 19 de la place des Vosges, et saisit l'arme et la coiffure du meurtrier.

En même temps- M. Carlier télégraphiait au service de Sûreté et des agents de M. Cochefert étaient aussitôt envoyés à la recherche de l'ouvrier bijoutier.

D'ailleurs, on n'eut pas la peine d'arrêter François Béchet; il vint lui-même se constituer prisonnier dans l'après-midi au service de Sûreté.

Il résulte de l'enquête à laquelle s'est livré M. Cochefert, que l'ouvrier bijoutier n'ignorait pas les relations ayant existé jadis entre M. Portai et sa femme. Celle-ci, au cours d'une scène de jalousie, aurait même avoué à son mari qu'elle aimait toujours le courtier en vins. D'où la colère de François Béchet.

Bref, les causes de ce drame sont tellement délicates, que nous n'y insisterons pas davantage.

Les blessures de M. Portal sont peu graves. Quant à l'ouvrier bijoutier, il a été gardé à la disposition de la justice.

Le Matin — 14 avril 1897

 Désespoir d'artiste

Désespoir d'artiste.

Claude Lantier, cet héroïque et navrant personnage de l'Œuvre, de Zola, que l'impuissance à réaliser ton idéal d'artiste entraîne petit à petit à la folie et pousse finalement au suicide, vient d'avoir son émule en la personne d'un jeune peintre, M. Jules Moland, descendant d'une ancienne famille française que la révocation de l'édit. de Nantes obligea à se réfugier en Autriche.

M. Jules Moland était venu à Paris, il y a environ deux ans, pour s'initier à l'art français ; il s'était installé dans un appartement luxueux, trop même, au n° 14 de la rue Gaillon.

Après avoir fréquenté le Louvre pendant plusieurs mois et étudié les maîtres des écoles picturales anciennes et modernes, il s'était jugé suffisamment sûr de lui-même pour produire à son tour une œuvre qui le «lasserait parmi les jeunes peintres actuels dont les noms reviennent le plus souvent sous la plume laudative des critiques d'art. Il se mit courageusement à la tâche, travailla d'arrache-pied des journées entières ; mais, hélas le soir venu, il était obligé de reconnaître que la couleur jetée fébrilement sur la toile était loin de réaliser l'œuvre qu'il portait en son cerveau.

Vingt fois il recommença son tableau et vingt fois il en arriva, à la pénible constatation de son impuissance. Cependant, son dernier effort ne lui avait pas paru être stérile. Pour se convaincre que cette fois, il en était arrivé à quelque chose d'exposable, il s'absenta pondant trois jours et revint devant son œuvre, pensant que l'éloignement lui permettrait de la juger non pas en artiste, mais en critique, « avec les yeux d'un autre », comme disent les peintres. Il trouva son tableau abominable, faux de tons et d'un dessin tout à fait enfantin. Alors une grande désespérance l'envahit, et, se voyant dans l'impossibilité de réaliser matériellement son œuvre idéale, il prit le parti de se donner la mort. M. Jules Moland s'étendit sur son lit, après avoir sabré à grands coups de pinceau son humiliant tableau, et il se tira une balle du revolver dans la tête. Le projectile dévia légèrement et ne lui lit pas la blessure mortelle souhaitée.

L'instinct de la conservation se manifesta- bientôt, et le jeune peintre, la tête ensanglantée, parut à la fenêtre, poussant des appels au secours. La concierge, des voisins, des passants montèrent à son appartement. Ils le trouveront assis dans un fauteuil, non loin de sa toile, affreusement barbouillée. Des soins lui furent prodigués sur place ; puis M. Jules Moland fut transporté à l'hôpital Saint-Louis.

L'état du malheureux, artiste été jugé si grave qu'on ne croit pas qu'il puisse survivre à sa blessure. L'extraction de la balle a été jugée impossible.

M. Péchard, commissaire de police du quartier Gaillon, a informé par dépêche la famille de M. Jules Moland de la tentative désespérée de cet infortuné jeune homme.

Le Matin — 26 août 1897

 RAFLE DE VAGABONDS

RAFLE DE VAGABONDS

Un charmeur de rats

La Sûreté a opéré l'avant-dernière nuit une rafle parmi les vagabonds qui cherchent un abri sous les ponts. Quarante-cinq individus ont été arrêtés. Sous le pont des Arts, les agents se sont livrés à véritable chasse à l'homme pour s'emparer des vagabonds abrités dans les ferments servant de soutien au tablier du pont. Pour ne pas tomber dans la Seine, les malheureux qui passent la nuit sous ce pont s'accrochent avec leur ceinture et leurs bretelles. Lorsqu'ils ont vu les agents, ils se sont sauvés d'arche en arche pour gagner l'autre rive, mais des agents les y attendaient et les ont capturés au fur et à mesure de leur arrivée.

Parmi les individus arrêtés se trouve un type très curieux, un nommé Émile Schwartz, âge de quarante ans, qui est sans domicile depuis vingt ans. Schwartz qui parcourt la France à pied, de village en village, est un barnum d'un nouveau genre. Il montre des souris blanches et des rats, qu'il loge sur sa poitrine, au-dessus de la ceinture de son pantalon. En même temps que lui, les agents ont amené à la Sûreté ses pensionnaires. Une odeur insupportable due aux croûtes de fromages avariées et aux fruits gâtés dont Schwartz nourrissait rais et souris, s'échappait des poches du vieux vagabond.

Quand on a fouillé Schwartz, les inspecteurs durent sortir de leur asile rats et souris et les déposer à terre. Chose curieuse, aucun de ces animaux ne se sauva et tous se groupèrent autour de leur maître. Ils attendirent derrière la porte du cabinet de M. Cochefert que leur maître sortit de chez le chef de la Sûreté.

Schwartz a été remis en liberté hier matin, et il a quitté la Sûreté avec ses rats et ses souris, qui y avaient trouvé un asile momentané.

Le Gaulois — 10 septembre 1897

Dans l'actualité du ...

 30 mars Mardi

Mardi
30 mars 1897

Dans l'après-midi d'hier, à quatre heures, le président de la République a reçu le duc de Cambridge, cousin de la reine d'Angleterre, et lui a rendu sa visite à cinq' heures et demie.

 

Entre temps, MM. Édouard Hervé, directeur, Anatole France, chancelier, et Gaston Boissier, secrétaire perpétuel de l'Académie française, avaient présenté à M. Félix Faure le marquis Costa de Beauregard, élu membre de la Compagnie le 28 février dernier.


Si les rois, jadis, épousaient des bergères, les. princesses, aujourd'hui, préfèrent les Millionnaires.

D'après le World, il serait question, à Londres, d'un prochain mariage entre la princesse Victoria, seconde fille du prince de Galles, seule de ses enfants qui ne soit pas mariée, et le richissime Américain, M. William Astor, propriétaire de la Pall Mall Gazette, lequel serait, pour l'occasion, créé duc.

Le nouvel époux deviendrait ainsi le beau-frère du duc de Fife, marié à l'aînée des filles du « Prince of Wales », qui descendant d'une famille Duff, ne fut créé comte du Royaume-Uni qu'en 1885 et, duc qu'eu 1889.


Plus que jamais Madagascar est d'actualité. L'exil de la reine, les complots anglo-protestants, le débat engagé devant les Chambres, rendent indispensable la lecture du curieux et précieux volume de notre confrère Émile Blavet « Au Pays malgache », qui continue à s'enlever en librairie.


Par décret du mikado, empereur du Japon le président de la République reçoit le grand-cordon de l'ordre du Chrysanthème; M. Hanotaux, l'amiral de Beaumont, commandant, l'escadre française d'Extrême-Orient, et le général de Boisdeffre sont nommés grand-croix du Soleil levant, et, enfin, l'amiral Sallandrouze de Lamornaix grand-cordon du Trésor sacré.


La route de Madagascar.

Des dépêches du parquet de Charleville signalent aux commissaires spéciaux des gares de chemins de fer A Paris la fugue de deux collégiens appartenant à d'honorables familles de cette ville.

Ces deux jeunes gens, André Siméoni, dix-sept ans, et Louis Becquart, quinze ans, ont réussi, on ne sait comment, à se procurer une somme de 500 francs et, avant de partir, samedi soir, ont raconté qu'ils avaient l'intention d'aller s'embarquer a Marseille à destination de Madagascar.

sans titre 1

 31 mars

Mercredi
31 mars 1897

ACCIDENT MORTEL

Un vieillard de soixante ans, Jean Gallier, nettoyeur de rails, a été victime, avant-hier, après midi, rue du Faubourg-Saint-Antoine, d'un accident qui a eu pour lui les plus funestes conséquences.

Ce pauvre homme poussait devant lui l'instrument servant à nettoyer l'intérieur des rails, lorsqu'arriva sur lui le tramway faisant le trajet du Louvre' à Vincennes. Le malheureux, qui était très sourd, n'entendit pas les appels de la trompe. Le cocher ne put arrêter à temps son attelage et le vieillard, renversé par le timon, eut la jambe droite broyée au-dessus du genou par les roues de la lourde voiture.

Gallier fut transporté à l'hôpital Saint-Antoine où l'amputation fut pratiquée sur-le-champ. Quelques heures plus tard; il rendait le dernier soupir.


Demain jeudi, de 3 h. à 6 h., concert dans la salle des fêtes des Grands Magasins Dufayel. Séance du Cinématographe Lumière. Tableaux animés et scènes parlées par M. Darthenay. Il sera offert à toute personne assistant à une séance un étui de Suprêmes Pernot. Exposition de mobiliers par milliers toujours prêts à être livrés, articles de chauffage, de ménage, literie, articles de jardin, etc., etc. Le succès toujours croissant de cet établissement est dû à la bonne qualité et au bon marché exceptionnel de ses marchandises.


Nansen à Rouen

Rouen. Nansen est arrivé aujourd'hui, à 3 h. 1/2, désireux, a-t-il dit en acceptant l'invitation de la Société de géographie, de renouer connaissance avec « ses cousins les Normands ».

L'explorateur a été reçu officiellement à la gare par la municipalité et par le consul de Suède et Norvège. La foule l'a acclamé sur tout le parcours de la gare à l'Hôtel de Ville.

Après une courte réception à la mairie, Nansen a visité, le palais de Justice, la statue de Rollon, la Grosse Horloge, où les enfants des écoles ont poussé des hourras, et enfin la cathédrale où il a été reçu par Mgr Sourrieu, archevêque de Rouen, Des bouquets ont été offerts a Mme Nansen. Dans la soirée, le Tout-Rouen avait envahi le théâtre pour écouter la conférence de l'orateur qui, au milieu d'applaudissements enthousiastes, a raconté son voyage au pôle Nord.


TONIFIER SANS IRRITER

Voilà le programme du toni-nutritif digne de ce nom. Ce programme a été fort bien rempli, de nos jours, par le Vin Désiles, dont tous les principes reconstituants et revivifiants se pénètrent, s'équilibrent et se pondèrent par une association scientifiquement antidiathésique. Dans tous les dépérissements chroniques, dans les anémies graves, dans les bronchites anciennes, d'une si désespérante ténacité, l'emploi du Vin Désiles vient à la rescousse des médications spécifiques. Employé seul, à la dose de deux verres à madère chaque jour, le Vin Désiles ranime les nutritions défaillantes ou incomplètes. La maigreur et la pâleur des enfants, les palpitations et les retards de la jeune fille, les crampes d'estomac réfractaires aux meilleurs traitements, le vice lymphatique ou chloro-anémique, qui sert de tremplin aux évolutions des plus graves maladies constitutionnelles, trouvent dans le toni-nutritif moderne un précieux médicament-aliment.

Dr  Cendre.
sans titre 1

A. ALLAISLe bon mot
d'Alphonse Allais

 Ah ! Le Moyen Âge, voilà une bonne époque pour les curés !


366. On espérait encore contre toute espérance, quand, le 22 septembre 1897, le bruit de la mort du général Bourbaki s'est répandu à Bayonne, y causant une douloureuse impression. Si souvent affirmée et démentie depuis quelques jours, cette nouvelle était cette fois malheureusement bien vraie.
Monselet disait souvent « L'ancienneté d'une maison est pour moi le plus sûr garant de l'excellence de ses produits. » Aussi la maison Marie Brizard et Roger, dont les chefs actuels sont les arrière-petits-neveux et arrière-petits- fils de ceux qui la fondèrent en 1755, avait-elle toute sa confiance et jamais il n'a bu d'autre anisette que l'anisette Marie Brizard et Roger, dont il existe deux qualités, la superfine et l’« extradry », plus corsée et plus sèche.
 Un garçon de recettes disparu - les aveux

Un garçon de recettes disparu

Les aveux des assassins

Lire de suite

 LES SENSATIONS D'UN PENDU

Les sensations d'un pendu

Lire

Le Crime de la rue Pierre-le-Grand

Le service de la Sûreté ne possède aucune piste sérieuse au sujet de l'assassinat dont a été victime Joséphine Bigot, la femme galante qui demeurait au numéro 3 de la rue Pierre-le-Grand.

Lire la suite ...

Drame de la jalousie

Nous en demandons bien pardon à nos lecteurs, mais il s'appelait Cochon, Alfred Cochon, par un o et habitait au n° 14 de la rue Poliveau.

Lire la suite ...
 JUGEMENT RÉFORMÉ

JUGEMENT RÉFORMÉ

La femme fut toujours une fleur admirable,

Cent poètes l'ont dit, d'Homère à notre Hugo ;

Mais il faut ajouter qu'elle est plus adorable,

Plus belle que jamais par l'emploi du Congo.

J. Galantin au savonnier Vaissier

Nouvelles à la main

Sur le boulevard à la porte d'un cercle

Sur le boulevard, à la porte d'un cercle
— Ce gros monsieur qui s'inquiétait de votre santé a l'air de vous porter beaucoup d'intérêt.
—Oui, beaucoup presque du trente pour cent; c'est mon usurier !

Hier soir

Hier soir, rue Le Peletier, une bonne femme à lunettes bleues, n'ayant qu'un bras, accostait les passants
— N'oubliez pas, mon bon monsieur, une pauvre femme affligée de la vue et d'un bras !
— Affligée d'un bras s'écrie S… en entendant cette requête, eh bien et moi donc qui en ai deux !

Le jeune Octave

Le jeune Octave, contemplant une gravure représentant des martyrs dans le cirque, à son oncle le colonel
—Aujourd'hui, n'est-ce pas, il n'y a plus de pays où les chrétiens sont livrés aux bêtes ?
— Oh! non, mon enfant. Et pourtant, il m'est arrivé parfois de coucher dans de sacrés lits d'hôtel.

 On parle suicides

On parle suicides.

— Il y a des gens dont !a mort ne veut pas, déclare Cabistrol. Ainsi moi, jadis, j'ai tenté cinq ou six fois de me tuer.

Maboulard, distrait, mais intéressé :

— Et vous n'avez jamais réussi ?

 Les deux adversaires se rendant

Les deux adversaires se rendant au lieu de rendez-vous dans le bois de Vincennes, se rencontrent au guichet de la gare de la Bastille.

X... demande un billet aller et retour.

― Vous êtes donc bien sûr de revenir ? dit Z... narquois.

— Absolument sûr.

— Alors je vous fais des excuses, poursuit Z... subitement radouci.


Echos et nouvelles

 Et la pluie continuait de tomber

Et la pluie continuait de tomber !

Depuis que le pluviomètre à l'usage des observatoires a été inventé, c'est-à-dire depuis plus de deux cents ans, il ne s'est jamais rencontré, paraît-il, un mois de septembre aussi mouillé qu'en l'an de grâce 1897.

Aussi les météorologistes sont fort embarrassés d'expliquer ce phénomène. Songez donc que l'observatoire de la tour Saint-Jacques a enregistré dans l'après-midi d'hier, de midi à trois heures seulement, 10 millimètres d'eau ! Cela représente une moyenne de 100 mètres cubes d'eau par hectare.

On essaye de nous consoler en nous rappelant le souvenir de journées plus désagréables encore, celle du 10 septembre de l'année dernière, par exemple, qui, par suite d'une trombe, de funeste mémoire, nous gratifia de 50 millimètres d'eau dans le court espace de deux heures et demie. Mais toutes ces consolations ne valent pas un bon parapluie !

Le Gaulois — 7 septembre 1897

 La bière ne conserve pas -- Le matin — 29 août 1897

La bière ne conserve pas.

Sait-on combien il y a de centenaires du sexe fort en Allemagne pour habitants ?

Quatorze seulement. Les sujettes de l'empereur Guillaume ont, par contre, la vie quatre fois plus dure. Elles sont juste soixante-quatre ayant dépassé de douze mois et plus l’âge critique de quatre-vingt-dix-neuf ans.

Le matin — 29 août 1897

 La Flamme et l'Ombre, par Léon Daudet - Fig 15/06/97 - PUB

Au moment où tout le monde prend son vol vers les plages, un roman qui arrive bien à son heure, c'est la Flamme et l'Ombre, par Léon Daudet. C'est un récit d'amour tragique à Venise, qui met en présence un intellectuel et une sensuelle dans le somptueux décor de la ville des lagunes. Ce roman, qui pourrait s'intituler « les Jeux de la fièvre et de la fatalité », paraît chez Fasquelle en un volume de la bibliothèque Charpentier.

 UN BON EXEMPLE - Fig 12/01/97

UN BON EXEMPLE

Comme tous les ans, après l'inventaire, M. Maurice Schwob, propriétaire des maisons des 100,000 Chemises, a réuni hier soir son nombreux personnel en un banquet chez Bonvalet.
Au dessert, M. Schwob a annoncé à ses collaborateurs que les affaires de l'exercice clos lui permettaient, comme les années précédentes, de distribuer des gratifications d'après le système habituel créé par la maison.
Cette fête commerciale, d'un aspect vraiment familial, a été des plus gaies et ne s'est terminée que fort tard dans la soirée.
On voudrait voir se propager des réunions semblables appelées à resserrer les liens entre les chefs de maison et leur personnel. C'est il y a sept ans que M. Schwob a commencé à distribuer à ses employés des gratifications basées sur les bénéfices et à les réunir dans une fête ; depuis, gratifications et réunions ont toujours eu lieu et il est bien probable qu'il en sera ainsi longtemps encore.

Le Figaro – 12 janvier 1897

 La peur des mots - 1897

La peur des mots.

La petite ville de Saint-Etienne-de- Saint-Geoirs (Isère), dont le maire est un député radical répondant au nom parfaitement inconnu à Paris d'Octave Chenavaz, a eu l'autre jour, comme à peu près partout sa petite fête au bénéfice des enfants pauvres.

Seulement radicalisme oblige la petite fête qui, partout ailleurs, s'intitulait « arbre de Noël», fut étiquetée, à Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs, «arbre du jour de l'an ».

C'est ainsi que, à Paris, les étudiants libres penseurs, et aussi, sans doute, quelques étudiants libres farceurs, baptisent « boul' Mich' » le boulevard Saint- Michel et rue Le la rue Monsieur-le- Prince.

Ces fantaisies rappellent un peu avec beaucoup moins d'esprit la réponse d'un ci-devant gentilhomme cité

en 1793 devant le Tribunal révolutionnaire.

Comme le président d'assassins la définition est de Robespierre lui-même lui demandait son nom et ses qualités, l'accusé répondit :

— Je n'ai pas de nom, je ne suis rien ni personne. Autrefois on m'appelait le comte de Saint-Cyr, mais aujourd'hui il n'y a plus de comte, ni de « de », ni de saint, ni de sire. C'est même assez ennuyeux pour vous, car enfin il vous sera difficile de condamner à mort quelqu'un qui n'existe pas.

Pour en revenir à M. Octave Chenavaz, député radical de l'Isère, qui supprime Noël de son calendrier, cela doit joliment le contrarier d'être maire d'une commune dans le seul nom de laquelle il y a deux saints.

Le Figaro - 10 janvier 1897

 La visite du président de la Rép

La visite du président de la République à l'hospice des vieillards de Boulogne

Le président de la République, accompagné général Tournier, des commandants Humbert et Legrand et de M. Le Gall, a quitté, hier, l'Élysée, à deux heures vingt, pour inaugurer le nouvel hospice des vieillards de Boulogne sur Seine.

Reçu au milieu des fleurs, des drapeaux et des vivats par le ministre de l'intérieur, les présidents du conseil municipal de Paris et du conseil général, les préfets de la Seine, de-police, MM. Poirrier, sénateur; Rigaud, député; Escudier, Peyron, etc., M. Félix Faute a répondu aux allocutions de M. Jochum, maire de Boulogne; Gervais et de Selves, par la remise de la rosette d'officier de l'instruction publique à M. Jochum, des palmes académiques à MM. Chevalier, secrétaire de la mairie de Boulogne, Gionnier professeur à l'Association philotechnique, et de la croix du Mérite agricole à MM.. Vidal-Beaume et Chartier.

Au cours de la distribution des médailles d'honneur, l'un des médaillés, vieux garçon de chantier, comptant plus de trente ans de services, voulait absolument, dans sa joie, embrasser lé président.

― On ne donne l'accolade, lui a fait observer M. Félix Faure, que lorsqu'on remet la Légion d'honneur nous verrons plus tard.

La visite de l'hospice a commencé par les dortoirs des  femmes, s'est poursuivie par les bâtiments réservés aux hommes, les cuisines, la machinerie, et s'est terminée par les réfectoires, dans l'un desquels un lunch avait été servi.

M. Gervais, président du conseil générale a porté un toast à la santé du président de la République, qui s'est  retiré, très acclamé, ainsi que M. Barthou.

Le Matin ― 18 mars 1897

Le Journal de 1897

Le journal de 1897 et des environs doit être vu avec un exploreur prenant en charge la mise en colonnes.
Chaque page se crée quand vous la consultez.
Les textes en ligne sont des reflets de la société française de la fin du XIXème siècle. La question est : "le Monde change-t-il vraiment ?".

                 Bonne lecture

menu-bas