Le scandale des Folies-Bergère évité - 15 avril 1897
Le scandale des Folies-Bergère évité
Une indisposition de commande. Intervention du préfet de police. — Exhibition
interdite
Le Gaulois — 15 avril 1897
Le Gaulois avait signalé avec une indignation légitime les débuts prochains,
sur la scène des Folies-Bergère, de l'ex-princesse et nos confrères, convaincus
comme nous du scandale formidable que cette exhibition devait fatalement soulever,
nous avaient emboîté le pas. Notre juste appel a été entendu. La « débutante »
ne débutera pas. Nous en sommes un peu la cause et nous nous en félicitons hautement.
En cette circonstance, M. Lépine a droit à nos remerciements et nous les lui
marchanderons d'autant moins qu'on sait que les fonctionnaires de la république
nous donnent rarement l'occasion de les féliciter.
On lira plus loin à la rubrique du « Courrier -des spectacles » la note
officielle que le théâtre des Folies-Bergère nous a adressée pour nous faire
savoir que l'ex-princesse ne débutait .pas ce soir sur la scène de la rue Richer.
Cette note nous montre la débutante empêchée par un état maladif d'une certaine
gravité. Il y est question d'influenza, de fièvre intense, de complication pulmonaire.
A la vérité, et fort heureusement pour l'héroïne en cause, sa santé est excellente
et les raisons pour lesquelles les amateurs de scandales ne. la verront pas
ce soir sont à un ordre-tout à fait différent.. Les voici dans toute leur simplicité..
Hier matin, M. Marchand, directeur des-Folies-Bergère, était appelé chez le
préfet de police, qui lui demandait officieusement de renoncera faire débuter
celle qui sur l'affiche devait porter le nom de l'ex-princesse.
Le scandale, prétendait le préfet, serait extraordinaire et des renseignements
qui lui étaient fournis, il ressortait que la débutante serait huée, qu'une
foule de gens s'étaient procurés des sifflets à roulette et qu'on lui jetterait
à la face des lapins vivants, des pelures de pommes de terre et d'autres objets
innommables.
M. Marchand répondit au préfet qu'il redoutait autant que lui ce scandale
et que si la « débutante » consentait à renoncer à ses projets de
paraître sur son théâtre, il s'en montrerait fort heureux pour sa part.
D'ailleurs il craignait si fort les manifestations brutales qu'il avait interdit
qu'on servit aucune consommation dans la salle et qu'il avait fait supprimer
les petits bancs et les lorgnettes automatiques.
— Puisque vous partagez mon avis lui, dit le préfet, voyez l'ex-princesse,
et tâchez qu'elle ne soit pas hostile à nos sages projets.
» D'ailleurs, je vais la convoquer pour ce soir, six heures, et je vous
prie de revenir à mon cabinet à la même heure. »
Puis, congédiant M. Marchand, le préfet ajouta :
— Allons, je commence à croire que nous parviendrons peut-être à éviter
tout scandale.
A six heures précisés, M. Marchand arrivait à l'hôtel du boulevard du Palais,
où, depuis un quart d'heure, la débutante l'avait précédé. L'héroïne fut reçue
la première. Le préfet fit valoir à ses yeux les motifs les plus sérieux qui
devaient la détourner de s’exhiber à la foule. Comme la « débutante »
semblait ne pas goûter ces raisons et qu'elle prétendait avoir le droit de débuter,
le préfet lui fit comprendre qu'il ne voulait prendre officiellement aucune
mesure vexatoire avant la représentation, mais que si celle-ci était scandaleuse,
ce qui était absolument certain, il se verrait dans la nécessité cruelle de
sévir en fermant le théâtre où elle aurait eu lieu et en invitant peut-être
la «débutante » a quitter le territoire français — mesure qu'il la suppliait
de ne pas l'obliger à employer.
Puis, très amicalement, très paternellement, M. Lépine insista sur des questions
d'ordre privé.
Il fut éloquent et persuasif, car à six heures et demie précises, l'ex-princesse,
très émue, renonçait à paraître sur la scène des Folies-Bergère.
Ce début à sensation n'aura donc pas lieu, et le scandale que nous redoutions
et qui eût été plus formidable que nul ne peut le soupçonner, est heureusement
étouffé.
La Presse a quelquefois du bon !
* * *
En quittant l'hôtel du Palais, Mme Clara Ward est rentrée à son hôtel, où
à peine installée, elle a reçu la visite d'un médecin, elle n'a pas eu de peine
à jouer le rôle de malade qui doit expliquer au public sa décision de ne pas
paraître aux Folies, car elle était effectivement souffrante.
Le docteur a indiqué l'ordonnance suivante: Prendre par jour, en deux
ou trois fois, deux à trois cuillers à potage de la potion suivante, diluée
dans un verre de tisane de mauve :
Acétate d'ammoniaque 15 gr
Alcool de racine d'aconit 30 gouttes Sirop de codéine
100 gr. Eau de fleurs d'oranger 40 gr.
Mme Clara Ward n'a pas décidé encore si elle resterait à Paris ou si elle
repartirait pour Berlin, où des offres brillantes lui sont faites par la Belle-Alliance,
un music-hall renommé sur les bords de la Sprée.
Ce que nous savons, c'est qu'aujourd'hui même l'héroïne de ce petit roman
doit aller poser chez un de nos grands photographes dans le costume suggestif
qu'elle devait endosser aux Folies-Bergère.
Enfin, cette tragédie finit heureusement en opérette Mme Clara Ward renonce
au théâtre, en France du moins, et rentre ainsi dans la vie privée. Nous n'avons
plus à nous occuper d'elle, et nous espérons bien qu'il en sera toujours ainsi.
Ajoutons que Mme Clara Ward qui s'est sagement abstenue d'envoyer du papier
timbré au Gaulois aurait moins sagement décidé d'en adresser à un de nos confrères.
Maubersac
Les femmes aux colonies - Le Figaro – 13 janvier 1897
Les femmes aux colonies.
Un discours de M. d'Haussonville
C'est une idée généreuse qui réunissait les participants
et les amis de l'Union coloniale française à la conférence faite hier soir dans
la salle de la Société de géographie par M. Chailley- Bert, sous la présidence
de notre éminent collaborateur, M. le comte d'Haussonville, de l'Académie française.
Assurer la vitalité, la prospérité de notre domaine d'outre-mer par l'émigration
des femmes aux colonies telle était la thèse. Elle fut brillamment soutenue.
Je ne veux point la discuter aujourd'hui. Ceci est un article de reportage.
Après avoir exposé avec bonne humeur « qu'il ne pouvait s'empêcher de nourrir
dans son esprit récalcitrant quelques objections à l'opportunité d'une politique
dont il ne méconnaît pas la grandeur, dont il comprend les mirages », M. d'Haussonville
s'est déclaré d'accord avec les coloniaux sur deux points :
Le
premier, a-t-il dit, c'est que le pays est aujourd'hui engagé trop avant dans
cette voie pour qu'il soit possible de revenir en arrière. Du moment que l'œuvre
coloniale a été entreprise, il faut qu'elle réussisse. Il y va non seulement
de l'intérêt, mais du bon renom et de l'honneur de la France.
Le second point
sur lequel je suis d'accord, c'est que l'œuvre coloniale, pour réussir, doit
être une œuvre nationale. J'entends par là qu'aucun bon citoyen n'en doit demeurer
exclu en raison des opinions qu'il professe ou de l'habit qu'il porte, et que,
sur ces plages lointaines où la patrie absente n'est représentée que par un
drapeau, il ne saurait plus être question de ces suspicions ni de ces intolérances
qui tendent à faire d'un certain nombre de Français non pas des émigrés, mais
des proscrits à l'intérieur. Je sais, messieurs les membres de l'Union coloniale,
que ces idées larges et libérales sont les vôtres et que vous avez voulu en
témoigner publiquement en appelant à la présidence de cette réunion quelqu'un
qui n'a pas craint ces années dernières de se compromettre par une politique
un peu ardente et qui, pour s'imposer aujourd'hui une certaine réserve, n'a
point changé et ne changera jamais de conviction ni d'espérance.
Ombre de Paul Bert !... M. Chailley- Bert, lui, ne bronchait pas. Il n'est plus
que colonial. La politique du beau-père n'eut jamais supporté semblable chose.
L'économie politique du gendre, de l'ancien collaborateur, sait se plier aux
circonstances par dévouement à la cause coloniale, s'entend.
M. le comte
d'Haussonville égratigne ensuite, en passant, les « féministes » qui « ont fait
tant de mal à la cause des femmes » il dit en quelques mots la triste situation
faite dans la métropole aux jeunes filles intelligentes, instruites, mais pauvres.
Eh bien si ce qu'on a dit à l’éminent académicien est vrai pour ces jeunes filles,
dans des colonies telles que la Nouvelle-Calédonie, la Tunisie, le Tonkin, n'y
aurait-il point des places et… des maris ?
En effet, dit-il, d'après
ce qui m'a été rapporté, sauf quelques exceptions très honorables, mais trop
peu nombreuses, il n'existe quant à présent aux colonies que deux catégories
de femmes bien distinctes les femmes de fonctionnaires, épouses dévouées, admirables,
mais qui, généralement, auraient souhaité voir leurs maris nommés partout ailleurs,
et les divettes de café-concert, qui, après avoir échoué d'abord à Paris, puis
en province, ont, avec trop de succès, emporté leur répertoire là-bas, La catégorie
intermédiaire, et en particulier celle des jeunes filles à marier, ferait complètement
défaut.
Il y a bien aussi les congrégations. Il y a ces saintes filles qui
vont partout où il y a quelque bien à faire, quelques misères à soulager et
dont la cornette, si bien portée, ne fait pas moins d'honneur à la France par
delà les mers que le képi de nos petits soldats. Dieu sait si elles sont utiles
là-bas. Mais, si, lorsqu'il s'agit du soin des malades ou de l'éducation des
enfants, les Sœurs sont admirables et peut-être irremplaçables, lorsqu'il s'agit
de mariage ce n'est plus la même chose, et c'est décidément à des laïques qu'il
faut s'adresser. Or, point de mariages, point de familles, et point de familles,
point non plus de colonies d'avenir.
Et M. d'Haussonville voudrait
des colonies françaises d'avenir, avec des familles françaises.
C'est au
milieu des applaudissements de l'assemblée qu'il a terminé son discours, rendant
quelque peu difficile la tâche au conférencier.
Mais le gendre et l'ancien
collaborateur de Paul Bert, bien que le sujet parût à première vue un peu en
dehors de ses habituelles préoccupations d'économiste, a su intéresser.
Il nous a dépeint la vie coloniale actuelle sous les plus sombres et les plus
tristes couleurs. « L'élément féminin y manque. La vie de famille n'existe presque
nulle part; et, là où elle existe, elle est menacée. » Le célibataire colonial
est en effet un être redoutable.
Et M. Chailley-Bert s'est mis en tête de
procurer des femmes aux colonies. Ne souriez point. Cela se fait en Angleterre.
Il s'y est fondé des Sociétés d'émigration féminine, telle, par
exemple, cette United British Women's Emigration Association, dirigée si brillamment
par sa secrétaire générale, Miss Lefroy, dont le but est de servir d'intermédiaire
entre la colonie qui manque de femmes et les femmes de la métropole qui manquent
de moyens d'existence. Cette Société rassemble, de tous les coins du royaume,
des jeunes filles ou jeunes femmes (dix-huit à quarante ans) méritantes et désireuses
d'émigrer elle les réunit à Londres, les loge, les patronne, les groupe, les
conduit au port d'embarquement, les fait accompagner durant le voyage par une
matrone d'expérience et de moralité connues, leur procure des emplois, les surveille,
les soutient, les assiste et ne les abandonne à elles-mêmes qu'au bout de plusieurs
années, quand elles ont trouvé une situation et, le plus souvent, un foyer.
Car le mariage, qui n'est pas le motif déterminant ni le but principal de cette
entreprise (la Société refuserait d'aider une jeune fille qui avouerait trop
ouvertement qu'elle émigre en vue non pas de gagner sa vie, mais de chercher
un mari), est du moins l'événement final entrevu, désiré, préparé.
Il y a là un moyen qu'on pourrait peut-être, dans l'intérêt de nos Colonies,
non pas copier mais imiter en l'adaptant à nos mœurs. Et M. Chailley-Bert a
développé le plan et les moyens d'action de la Société à créer. « Cette Société
que l'Union coloniale prendra sous son patronage, s'efforcera de développer
par des conférences, des brochures, etc., le goût des femmes pour la vie coloniale.
Elle fournira de plus à celles qui l'ont déjà (et elles sont plus nombreuses
qu'on ne croit) les moyens de se fixer dans nos colonies les plus saines, Tunisie,
Nouvelle-Calédonie, Indo-Chine. Dans chacune d'elles, elle constituera un Comité
local, composé des femmes les plus en vue (femmes des gouverneurs, des résidents,
des officiers supérieurs, des principaux colons, etc.), chargé de recevoir,
de guider la nouvelle arrivante.»
Il y a là, dit en terminant M. Chailley-
Bert, un programme très séduisant. D'accord. Mais pour séduisant qu'il soit,
il n'en appelle pas moins la critique. Jusqu'à présent, l'«Union coloniale»,
servant les intérêts de ses membres sociétaires (cotisation annuelle de mille
francs), a pu, suivant les promesses de son prospectus, « être un intermédiaire
disposant d'une influence considérable pour les faire aboutir, par une intervention
soit auprès du ministère des colonies, soit auprès du département des affaires
étrangères, soit auprès des administrateurs de nos colonies, naturellement plus
accessibles aux démarches émanant d'une collectivité autorisée qu'aux sollicitations
individuelles ». Mais elle s'attaque aujourd'hui à des lois moins flexibles
que les lois humaines. Il ne suffit pas d'avoir de l'influence dans les ministères
pour résoudre le problème du peuplement de nos colonies par l'acclimatation
de la famille française. Le problème est plus vaste. J'y reviendrai.
Jean Hess.
Le Figaro – 13 janvier 1897
L'actualité dramatique
Le drame de la rue d'Angoulême
Le drame de la rue d'Angoulême.
Un terrible drame de la misère s'est déroulé hier, 37, rue d'Angoulême.
A cette adresse habitaient M. Jules Fourneau, âgé de quarante-sept ans,
garçon coiffeur, et sa belle-mère, Mme veuve Astier, âgée de soixante-onze ans.
Le gendre et la belle-mère étaient venus habiter rue d'Angoulême à la suite
du décès de Mme Fourneau.
Il y a quelque temps, Mme veuve Astier tombait gravement malade et se
trouvait dans l'impossibilité de travailler.
Peu après, le garçon coiffeur perdait son emploi et ne parvenait pas à
trouver une nouvelle place.
Bref, ces jours derniers, les deux malheureux ne pouvaient payer leur terme
et se trouvaient sans un sou pour vivre. Ils résolurent alors de se tuer.
Le 13 courant, ils s'enfermaient dans leur chambre, dînaient confortablement,
puis absorbaient de l'acide sulfurique mélangé à une infusion de camomille. Ils
fixaient ensuite une corde aux triangles des rideaux de deux fenêtres se faisant
vis-à-vis, et se pendaient.
Hier après-midi, les voisins, ne les voyant pas sortir, prévinrent M.
Daltroff, commissaire de police, qui fit ouvrir la porte par un serrurier et
trouva les deux cadavres pendus en face l'un de l'autre, dans un état de
décomposition déjà avancé.
Fourneau et la veuve Astier avaient écrit avant de mourir, un billet dans
lequel ils déclaraient qu'ils se suicidaient pour échapper à la terrible misère
qui les étreignait.
Le Matin — 17 avril 1897
LA PETITE JEANNETTE
LA PETITE JEANNETTE
Jeanne Brémoncourt, surnommée la petite Jeannette, âgée de vingt ans,
demeurant, 1, rue Broca, se voyait, il y a quelques jours, souffler son amant
par une de ses amies. Elle en conçut un violent dépit. Hier soir, elle se rendit
chez un marchand de vins où sa rivale avait coutume de dîner, afin de la
souffleter.
La bataille fut chaude. Les chignons furent ̃consciencieusement crêpés; mais
le résultat fut contraire aux espérances de la petite Jeannette, qui reçut une
maîtresse volée. Folle de douleur et de rage, elle tira un flacon de chlorydrate
de morphine de sa poche et en absorba entièrement le contenu. Elle a été
transportée mourante à l'hôpital Cochin.
Le Figaro - 25 août 1897
>
RAFLE DE VAGABONDS
RAFLE DE VAGABONDS
Un charmeur de rats
La Sûreté a opéré l'avant-dernière nuit une rafle parmi les vagabonds qui
cherchent un abri sous les ponts. Quarante-cinq individus ont été arrêtés. Sous
le pont des Arts, les agents se sont livrés à véritable chasse à l'homme pour
s'emparer des vagabonds abrités dans les ferments servant de soutien au tablier
du pont. Pour ne pas tomber dans la Seine, les malheureux qui passent la nuit
sous ce pont s'accrochent avec leur ceinture et leurs bretelles. Lorsqu'ils ont
vu les agents, ils se sont sauvés d'arche en arche pour gagner l'autre rive,
mais des agents les y attendaient et les ont capturés au fur et à mesure de leur
arrivée.
Parmi les individus arrêtés se trouve un type très curieux, un nommé Émile
Schwartz, âge de quarante ans, qui est sans domicile depuis vingt ans. Schwartz
qui parcourt la France à pied, de village en village, est un barnum d'un nouveau
genre. Il montre des souris blanches et des rats, qu'il loge sur sa poitrine,
au-dessus de la ceinture de son pantalon. En même temps que lui, les agents ont
amené à la Sûreté ses pensionnaires. Une odeur insupportable due aux croûtes de
fromages avariées et aux fruits gâtés dont Schwartz nourrissait rais et souris,
s'échappait des poches du vieux vagabond.
Quand on a fouillé Schwartz, les inspecteurs durent sortir de leur asile rats
et souris et les déposer à terre. Chose curieuse, aucun de ces animaux ne se
sauva et tous se groupèrent autour de leur maître. Ils attendirent derrière la
porte du cabinet de M. Cochefert que leur maître sortit de chez le chef de la
Sûreté.
Schwartz a été remis en liberté hier matin, et il a quitté la Sûreté avec ses
rats et ses souris, qui y avaient trouvé un asile momentané.
Le Gaulois — 10 septembre 1897
Dans l'actualité du ...
27 janvier
Mercredi 27 janvier 1897
Tout le monde sait que le poète Jean Richepin manifeste des goûts très
prononcés pour les sports athlétiques. Gymnastique, boxe, chausson,
canotage, bicyclette, natation n'ont aucun mystère pour le poète des
Touraniens.
Cette passion vient de lui jouer un vilain tour. Il ya
environ trois semaines, en esquissant dans le vide quelques magnifiques
parades de la jambe, M. Richepin s'est déboîté le genou.
A l'heure qu'il
est, il est encore à peu près immobilisé dans une gaine de cuir qui lui
serre la jambe. II n'en suit pas moins avec assiduité les répétitions de
Chemineau, à l'Odéon mais avec quelle peine il se voit condamné à rester au
repos, au lieu de prendre part à la mise en scène active de son drame, on le
devine aisément.
Nous souhaitons à notre confrère une prompte guérison,
ce qui ne saurait tarder, étant donnée la grande habitude qu'il a du «
rétablissement »
La contamination-par la prestation du serment en Angleterre
On sait que tout sujet de la reine Victoria appelé à témoigner devant la
justice de son pays doit .prêter le serment de dire « la vérité, toute la
vérité », en déposant un baiser sur un exemplaire du Nouveau Testament,
spécialement destiné à cet usage. On pense bien que ce volume n'est pas
renouvelé après chaque baiser, ni même après chaque audience. Aussi cette
cérémonie, qui devrait être solennelle, n'inspire-t-elle que le dégoût aux
gens bien élevés. Il est fortement question d'adopter en Angleterre et en
Irlande le système employé pour la prestation du serment en Écosse,
c'est-à-dire une formule que le témoin récite en tenant la main droite
levée.
Un jugement bien intéressant pour tous les Parisiens
Dans son audience du 13 janvier courant, le juge de paix du neuvième
arrondissement a jugé que l'on peut monter toutes les fournitures même le
charbon à toute heure, par les escaliers de service, quand même le bail
contiendrait une clause contraire, laquelle serait abusive.
Paris compte depuis hier soir une nouvelle association. C'est
l'association des « Cent kilos de Paris » [dont nous avons déjà parlé]. Pour
en faire partie, il faut peser au moins cent kilos. Les adhérents, au nombre
de quarante-six, se sont réunis dans un établissement de la rue de la
Folie-Méricourt, sous la présidence d'un commerçant du quartier, M. Flèche,
dont le poids est de 160 kilos. Les « Cent kilos » ont jeté les bases de
leur nouvelle association et en ont rédigé, séance tenante, les statuts.
Parmi eux, se trouve un jeune cuisinier parisien qui s'intitule le plus «
gros conscrit de France ».
Olivier Flomont c'est le nom de ce moderne Vatel pèse exactement 155
kilos et mesure 1 m. 51 de tour de taille.
Les femmes seront rigoureusement exclues de cette association originale.
Elles ne seront même pas admises aux deux banquets qui auront lieu chaque
année.
C'est le cas de répéter, comme dans le Petit Duc « Pas de femmes ! »
Nous ne savons si les « Cent kilos » seront des hommes de jugement. En
tout cas, ce seront des hommes de poids.
Conseil pratique
Pour assainir les chambres des malades. Faites des vaporisations avec de
l'eau de bi-borax et étendez sur une corde un drap imbibé de cette même
solution.
Toutes les expectorations du malade doivent être couvertes de
bi-borax en poudre, et les objets dont il s'est servi, trempés, rincés et lavés
dans de l'eau chaude contenant du bi-borax (deux cuillerées à bouche par litre).
Ce procédé assure une parfaite désinfection, sans aucun des inconvénients de
certains antiseptiques.
C'est aujourd'hui qu'a lieu, à la galerie Georges Petit, la vente de la
précieuse collection de tableaux modernes provenant de la succession d'un
Parisien très connu, récemment décédé.
Les propos du vieux docteur.
« Plethora omnium morborum mater.»
Ainsi parle la science, en
latin; en français, nous dirons Toutes les maladies ont pour cause la
pléthore abdominale, et, pour les éviter, il faut prendre tous les matins à
jeun, immédiatement avant le petit déjeuner, un verre de la bienfaisante eau
de Carabana.
Un concours de poésie est ouvert en ce moment, sous les auspices de
l'Académie poétique du Midi, 2, rue Sainte-Calixte, à Marseille.
Pour les conditions, demander le programme au président.
Hors Paris
De Budapest:
« Le célèbre littérateur Maurice Jokai vient d'être nommé membre à vie de
la Chambre des magnats. »
sans titre 1
28 janvier
Jeudi 28 janvier 1897
Le préfet de la Seine a visité hier, dans le dixième arrondissement, la maison
Dubois, la crèche laïque de la rue Saint-Maur, le dispensaire gratuit pour enfants
malades et nécessiteux et les services de la voirie.
Dans sa dernière réunion, le Syndicat des explorateurs français a décidé
de prendre 'initiative d'une souscription nationale pour élever un monument
à la mémoire des explorateurs français morts en cours de mission.
La distribution des prix aux élèves des cours gratuits commerciaux du Grand-Orient
de France aura lieu demain, vendredi, à huit heures du soir, 16, rué Cadet,
sous la présidence de M. Gervais, président du conseil général de la Seine.
Le baron de Soubeyran a passé, hier, une journée beaucoup moins bonne que
la veille.
Voici le bulletin rédigé à onze heures du soir par le docteur Lereboullet
« Faiblesse progressivement croissante. »
Le banquet annuel du Syndicat de la presse française périodique aura lieu
le samedi 30 janvier, à sept heures et demie, au Diner Français, 27, boulevard
des Italiens, sous la présidence de M. Catulle Mendes. assisté de MM. François
Coppée et Victorin Joncières.
Carnets bien tenus.
Sur la plainte d'un restaurateur de la rue Gay-Lussac, M. Lanet, commissaire
de police, a envoyé au Dépôt un nommé François Salomon, âgé de quarante-neuf
ans, sans domicile, inculpé de filouterie d'aliments.
Cet individu a été trouvé-porteur de deux carnets, dont l'un contenait les
adresses de restaurateurs susceptibles d’être escroqués et, l'autre, celles
des restaurateurs qui ont été déjà victimes de l'individu.
Le petit Pierre.
M. Espinas aura terminé dans quelques jours l'instruction relative à l'affaire
de la rue du Dessous-des-Berges.
Hier encore, Grégoire, la femme Deshayes et la mère de Grégoire ont été interrogés
par le magistrat enquêteur. Les trois inculpes ne paraissent pas avoir conscience
de leur responsabilité, et ils sont restés parfaitement indifférents lorsqu'on
leur a fait le récit des touchantes funérailles du petit Pierre.
On pense que l'affaire pourra être appelée devant la cour d'assises de la
Seine dans la première quinzaine de mars.
Asphyxiée par le gaz.
Une jeune femme de chambre, Rosé Sitterlet, au service de Mme Andrée Mégard,
l'artiste du Palais-Royal, vient d'être victime d'un bien triste accident.
Avant de s'endormir, la camériste avait fait chauffer, sur un petit réchaud
à gaz placé à proximité de son lit, de l'eau destinée à une infusion de camomille.
Sur ces entrefaites, le sommeil ferma les paupières de Mlle Sitterlet, et il
advint que l'eau, portée au degré de l'ébullition, déborda du vase et éteignit
le gaz, qui continua de s'échapper pour remplir bientôt la chambre de ses émanations
asphyxiantes.
La jeûné camériste a été trouvée inanimée sur son lit et, malgré tous les
soins qui lui ont été prodigués, il été impossible de la rappeler a la vie.
sans titre 1
Le bon mot d'Alphonse Allais
Méfiez vous de l'assassinat, il conduit au vol et, de là à la dissimulation.
323. M. Houssay, maître de conférences de zoologie à l'Ecole normale supérieure, fut autorisé à se faire suppléer, du 1er mars au 31 juillet 1897, par M. Mesnil, docteur es sciences naturelles.
On n'ose quelquefois pas offrir un objet utile, alors qu'il serait si bien reçu ! Ainsi, aujourd'hui que le luxe des appartements se développe de plus en plus, un éventail Louis XVI, dont les feuilles de bronze doré se déplacent si gracieusement devant le feu, ou encore un écran doré style Louis XV, se peut envoyer parfaitement en cadeau familier. Ces très jolis articles, ainsi que tous ceux concernant la cheminée chenets, galeries, landiers, existent en un choix aussi complet qu'avantageux dans les vastes magasins des établissements Allez frères, dont le catalogue est déjà précieux à consulter.
Un attentat criminel a été commis hier, en plein jour, rue La Feuillade, près de la place des Victoires. Un jeune homme, le comte Guy de Malmignati, docteur en droit, qui se trouvait à Paris depuis une quinzaine de jours seulement, s'arrêtait là pour lire une des nombreuses affiches qui tapissent la muraille, quand, tout à coup, un individu armé d'un rasoir s'est approché de lui.
Léon Moynet, âgé de quarante ans, journalier, et Eugénie Jannin, femme Bossin, d'un an plus jeune, vivaient ensemble depuis plusieurs mois. Ils occupaient, 4, impasse de l'Astrolabe, une chambre au quatrième étage. Le faux ménage avait vécu très uni jusqu'à ces jours derniers ; mais Moynet, ayant cru s'apercevoir qu'un de ses voisins se montrait plus empressé qu'il ne fallait auprès de sa maîtresse
De son corps on peut dire : « Ah quel sexe charmant ! »
Un féministe au savonnier Vaissier.
Nouvelles à la main
Calino se pique de prononcer l'italien
Calino se pique de prononcer l'italien dans la perfection — Savez-vous,
lui demande-t-on, combien la Duse donnera de représentations ? — Mais douze,
dit-il, comme son nom l’indique !
>
A Montmartre
A Montmartre.
— Hein ! a-t-il de la chance cet animal de Z….
— Pourquoi ?
— Il dit qu'on vend ses tableaux comme du pain.
— II a voulu dire comme des croûtes !...
>
Un ancien entrepreneur de maçonn
Un ancien entrepreneur de maçonnerie, enrichi par d'heureuses spéculations
foncières s'est fait construire, aux Champs-Élysées, un hôtel où il a installé
sa femme et sa fille. Ces dames, un peu dépaysées dans ce riche quartier,
déplorent leur isolement, leur manque de distractions. Nous vivons comme des
recluses ! récriminent-elles. A quoi le parvenu de répliquer, en haussant
les épaules — Je vous conseille de vous plaindre. De la réclusion sur du
terrain à douze cents francs le mètre
>
A la correctionnelle
A la correctionnelle — Prévenu, quelle est votre profession ? .̃̃̃̃.
— Traducteur.. Le président, à la fois sévère et facétieux — Si vous
n'aviez jamais fait que des traductions, vous ne seriez pas aujourd'hui traduit
vous-même devant la justice de votre pays!
>
Les deux adversaires se rendant
Les deux adversaires se rendant au lieu de rendez-vous dans le bois de
Vincennes, se rencontrent au guichet de la gare de la Bastille.
X... demande un billet aller et retour.
― Vous êtes donc bien sûr de revenir ? dit Z... narquois.
— Absolument sûr.
— Alors je vous fais des excuses, poursuit Z... subitement radouci.
Et la pluie continuait de tomber
Et la pluie continuait de tomber !
Depuis que le pluviomètre à l'usage des observatoires a été inventé,
c'est-à-dire depuis plus de deux cents ans, il ne s'est jamais rencontré,
paraît-il, un mois de septembre aussi mouillé qu'en l'an de grâce 1897.
Aussi les météorologistes sont fort embarrassés d'expliquer ce phénomène.
Songez donc que l'observatoire de la tour Saint-Jacques a enregistré dans
l'après-midi d'hier, de midi à trois heures seulement, 10 millimètres d'eau !
Cela représente une moyenne de 100 mètres cubes d'eau par hectare.
On essaye de nous consoler en nous rappelant le souvenir de journées plus
désagréables encore, celle du 10 septembre de l'année dernière, par exemple,
qui, par suite d'une trombe, de funeste mémoire, nous gratifia de 50 millimètres
d'eau dans le court espace de deux heures et demie. Mais toutes ces consolations
ne valent pas un bon parapluie !
Le Gaulois — 7 septembre 1897
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Peau humaine bien saine à vendre - APL 14/02/97
Petite nouvelle de l'étranger...
Une jeune femme californienne vient de mettre sa peau en vente pour greffes
médicales. Il y a environ un an, elle permit à un ami d'en prélever un lambeau
pour une opération de ce genre ; ayant constaté qu'elle était capable de
résister à la douleur, résultat d'une pareille ablation, et que sa peau était
très saine et se reconstituait facilement, elle lança des circulaires à tous les
médecins de San-Francisco, les informant qu'elle avait de la peau humaine bien
saine à vendre. Elle a maintenant autant de commandes qu'elle peut en désirer, à
raison de 4 dollars par pouce carré. Nous sommes devenus pratiques depuis
les temps de saint Barthélémy.
APL – 14 février 1897
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La Flamme et l'Ombre, par Léon Daudet - Fig 15/06/97 - PUB
Au moment où tout le monde prend son vol vers les plages, un roman qui arrive
bien à son heure, c'est la Flamme et l'Ombre, par Léon Daudet. C'est un récit
d'amour tragique à Venise, qui met en présence un intellectuel et une sensuelle
dans le somptueux décor de la ville des lagunes. Ce roman, qui pourrait
s'intituler « les Jeux de la fièvre et de la fatalité », paraît chez Fasquelle
en un volume de la bibliothèque Charpentier.
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Le « jeteur de sel » - APL 31/01/97
Le « jeteur de sel »
Le « jeteur de sel » est un personnage que l'on a vu fonctionner, à Paris,
ces huit derniers jours — depuis la neige. Le sel est employé pour hâter la
fonte des neiges. Répandu à la surface de la chaussée, il forme avec la neige un
mélange réfrigérant que l'action de la circulation transforme généralement assez
vite en boue noirâtre demi-liquide — ô combien ! — pouvant être facilement
poussée à l'égout soit au moyen de raclettes et de balais, soit à l'aide de
machines balayeuses. Il faut 150 grammes de sel par mètre carre pour
provoquer la fonte d'une couche de neige de 4 à 5 centimètres. On emploie
peu les tombereaux, ce procédé coûtant très cher, la décharge des neiges se fait
en Seine pour les dix arrondissements qui y confinent, et en égout pour les
autres. Aux termes de son traité, la Compagnie des Omnibus doit mettre 50
tombereaux à la disposition des ingénieurs municipaux. Au commencement de chaque
hiver, elle effectue aussi le transport de 4,000 mètres cubes de sable. La
statistique nous apprend enfin que les dépenses de l'enlèvement des neiges se
sont élevées, en 1893, à 950,000 fr. environ ; en 1894, à 205,000 fr., et en
1895, à 758,000 fr. Voilà beaucoup d'argent gaspillé. Mais, enfin, il n'est
pas perdu pour tout le monde!...
APL – 31 janvier 1897
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Un joli mot de Mgr Fabre - 1897
Un joli mot de Mgr Fabre, l'évêque de de Montréal, qui vient de mourir et qui
ne voilait pas ses sentiments très français. Un jour à la table du gouverneur
du Dominion, il dit au courant de la conversation « La France notre mère! » —
La France votre mère interrompit le gouverneur. Mais alors qu'est pour vous
l'Angleterre? — Notre belle-mère, répliqua sans sourciller l'éminent
prélat.
Le Figaro - 6 janvier 1897
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La visite du président de la Rép
La visite du président de la République à l'hospice des vieillards de
Boulogne
Le président de la République, accompagné général Tournier, des commandants
Humbert et Legrand et de M. Le Gall, a quitté, hier, l'Élysée, à deux heures
vingt, pour inaugurer le nouvel hospice des vieillards de Boulogne sur Seine.
Reçu au milieu des fleurs, des drapeaux et des vivats par le ministre de
l'intérieur, les présidents du conseil municipal de Paris et du conseil général,
les préfets de la Seine, de-police, MM. Poirrier, sénateur; Rigaud, député;
Escudier, Peyron, etc., M. Félix Faute a répondu aux allocutions de M. Jochum,
maire de Boulogne; Gervais et de Selves, par la remise de la rosette d'officier
de l'instruction publique à M. Jochum, des palmes académiques à MM. Chevalier,
secrétaire de la mairie de Boulogne, Gionnier professeur à l'Association
philotechnique, et de la croix du Mérite agricole à MM.. Vidal-Beaume et
Chartier.
Au cours de la distribution des médailles d'honneur, l'un des médaillés,
vieux garçon de chantier, comptant plus de trente ans de services, voulait
absolument, dans sa joie, embrasser lé président.
― On ne donne l'accolade, lui a fait observer M. Félix Faure, que lorsqu'on
remet la Légion d'honneur nous verrons plus tard.
La visite de l'hospice a commencé par les dortoirs des femmes, s'est
poursuivie par les bâtiments réservés aux hommes, les cuisines, la machinerie,
et s'est terminée par les réfectoires, dans l'un desquels un lunch avait été
servi.
M. Gervais, président du conseil générale a porté un toast à la santé du
président de la République, qui s'est retiré, très acclamé, ainsi que M.
Barthou.
Le Matin ― 18 mars 1897
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Le Journal de 1897
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Les textes en ligne sont des reflets de la société française
de la fin du XIXème siècle. La question est : "le Monde
change-t-il vraiment ?".