Dans l'actualité des ...
Le Prince de Galles est arrivé hier soir à Paris à cinq heures quarante par le rapide de Boulogne. Il est descendu avec son aide de camp, sir E. Fortescue, et les personnes de sa suite, à l'hôtel Bristol, où les appartements que le Prince occupe habituellement lui avaient été réserves.
Le Prince avait quitté Londres par train spécial, hier matin, et avait fait la traversée de Folkestone à Boulogne sur le yacht Albert-Victor, spécialement aménagé pour lui.
Une réception brillante a été faite au Prince à Boulogne, où il est arrivé à une heure quarante, en compagnie du capitaine Boxer, de la Compagnie South-Eastern.de sir E. Fortescue, de sir W. Hafnerd, intendant des voyages, et de sa suite.
Il a été reçu par le sous-préfet, les officiers de la garnison, les membres de la chambre de commerce, le représentant du Souvenir français, les principaux fonctionnaires, les officiers de la douane, et M. Farmer, vice-consul d'Angleterre.
Le Prince est descendu au buffet maritime, où il a déjeuné.
Il est parti à deux heures vingt par le train de marée, dans lequel a pris place M. Grasset, inspecteur de la Compagnie du Nord.
Deux mille personnes ont acclamé le Prince de la gare maritime à la gare centrale; le Prince saluait la foule.
Les chars du carnaval et une musique se tenaient sur le parcours. Le God save the Queen a été exécuté à deux reprises différentes.
Le train, sur le désir du Prince, s'est arrêté au milieu du quai, où la femme d'un matelot lui a offert un bouquet au nom de l'Union commerciale.
Contrairement à l'affirmation d'un de nos confrères, Baboum et Ballon, les deux chimpanzés qui font sans cesse la joie des habitués du jardin des Plantes, sont complètement remis de la bronchite dont ils avaient été atteints il y a deux mois. Au lieu de viandes rôties et d'œufs à la coque, on leur donne maintenant des bananes, des olives, des arachides, le tout .arrosé de vingt décilitres de vin. Comme dessert ils ont une mangue.
Un jour sur trois ils sont à la diète.
Et quand on pense à ceux qui n'étant que des hommes…
C'est par erreur qu'on a annoncé l'interdiction de !a vente des « rigolos », ces animaux en carton découpé qu'on fiche dans le dos des passants au moyen d'une griffe en acier.
Aucune mesure de ce genre n'a encore été prise par le préfet de police.
La jeune Germaine Thomas, âgée de dix ans, demeurant chez ses parents, 110, rue Oberkampf, a reçu sur la tête, hier, vers trois heures de l'après-midi, un pot de fleurs tombé d'une fenêtre du cinquième étage. La victime a été transportée mourante à l'hôpital Saint-Louis.
Jeudi, concert, de trois heures à six heures, dans la salle des Fêtes des grands magasins Dufayel. Séances du Cinématographe Lumière, scènes animées et parlantes, par M. Dartenay. Il sera offert, à toute personne assistant à une séance du Cinématographe, un étui de Suprêmes Pernot. Le même jour, exposition de mobiliers complets par milliers, prêts à être livrés et marqués à des prix défiant toute concurrence. Ce qui explique le succès toujours grandissant de la maison Dufayel, qui a quarante années d'existence, c'est que toutes ses marchandises sont de première qualité et d'un réel bon marché.
Un vol des plus singuliers à été commis la nuit dernière au préjudice de M. Leroy loueur de voitures, rue Montmartre, a. Saint-Ouen.
Un individu, sans doute un .ancien palefrenier, s'est introduit dans les écuries du loueur et s'est mis en devoir de couper les crins de la queue et de l'encolure de 70 chevaux. C'est une perte considérable pour M. Leroy qui ne peut plus louer, ces chevaux sans queue ni crinière.
M. Beaurain commissaire de police, à qui plainte été déposée, fait activement rechercher l'auteur de ce vol étrange.
M. Petit, également loueur de voitures à Saint-Ouen, a été victime tout récemment d'une mésaventure identique.
CONSTANTINOPLE, 2, mars. D'un correspondant. La Porte a envoyé aux puissances une note leur demandant de faire tous leurs efforts pour forcer la Grèce à retirer de Crète ses troupes militaires et navales.
La Porte base cette demande sur l'engagement solennel pris par les puissances qui, au moment de signer le traité de Berlin, en 1856, ont promis de maintenir l'intégrité de l'empire ottoman.
LONDRES, 2 mars. Par fil spécial, L'ambassadeur de Turquie a eu, cet après-midi, une entrevue avec lord Salisbury.
MADRID, 2 mars.- D'un correspondant. Le général Weyler, dans une lettre adressée de Santa-Clara au ministre de la guerre, déclare que, malgré les nouvelles pessimistes dont quelques journaux se sont faits l'écho, les rebelles continuent de reculer vers la partie orientale de l'île. Il ajoute que l'état sanitaire des troupes est, dans ce moment-ci, en sérieuse amélioration. Les malades soignés dans les hôpitaux ne dépassent pas 2,000, tandis qu'au commencement de décembre, ils s'élevaient à 10.000.
Le conseil, réuni, hier matin, à l'Élysée, s'est occupé des questions qui vont venir en discussion devant les Chambres. M. Hanotaux a mis ses collègues au courant de la situation des événements d'Orient.
Le ministre de la guerre a fait signer un décret portant promotion au grade de général de division du général de brigade de Geoffre de Chabrignac, commandant l'artillerie du 4ème corps d'armée.
M. de Selves, préfet de la Seine, a quitté Paris pour quelques jours, se rendant dans le Tarn-et-Garonne.
M. Paul Bonnetain, qui fut pendant quelques mois directeur des affaires indigènes au Soudan, vient d'être chargé d'une mission au Laos.
Le bruit court, à Toulon, que le vice-amiral Gervais remplacera à la tête du 5e arrondissement maritime le vice-amiral Brown de Colstoun.
Il est question de profiter des vacances pour construire, à l'Élysée, une plus vaste salle des Fêtes, dont le récent bal .de la présidence a démontré l'insuffisance une fois déplus.
En ce cas, on utiliserait une partie de la cour des écuries pour prolonger la grande salle à manger presque jusqu'au faubourg Saint-Honoré.
D'autres légères modifications seraient apportées également à la serre et à la petite salle des Fêtes.
Le prince de Galles a été reçu, hier, à trois heures et demie, par le président de la République, qui lui a rendu sa visite à cinq heures, à l'hôtel Bristol.
M. Pierre de Coubertin vient d'être informé par le secrétariat général de la présidence que M. Félix Faure accepte la présidence d'honneur du congrès international des Jeux olympiques qui doit se tenir au Havre, cette année, du 23 juillet au 1er août.
Les apéritifs nuisibles et de mauvaise qualité amers, bitters, absinthe, vermouths, sont remplacés par le Quinquina Dubonnet.
Le prince Danilo de Monténégro, venant de Baden-Baden, est parti hier soir de Paris pour Cettigne.
MM. Léon Bonnat et Aimé Morol ont remporté, à l'Exposition internationale des Beaux-Arts de Florence, l'un, le premier prix, médaille d'or de l'Académie des beaux-arts, le second, une autre distinction de premier ordre.
L'ambassadeur d'Angleterre et lady Monson ont donné, hier matin, à l'hôtel du faubourg Saint-Honoré, un déjeuner intime en l'honneur du prince de Galles.
M. Hanotaux, ministre des affaires étrangères, et les attachés de l'ambassade étaient exclusivement parmi les invités.
Le dîner que M. Georges Coçhery, ministre des finances, offre mardi prochain aux ambassadeurs et aux membres du cabinet sera suivi d'une soirée avec concert, comédie et ballet.
A cette réception sont conviés les membres du Parlement et leurs familles.
Les autres personnes seront reçues sur Invitations.
Depuis avant-hier soir, Bondy et Noisy-le-Sec ont, moins que jamais, le droit de s'appeler cités-lumières.
Fatiguées de lutter contre les exigences d'une Compagnie qui s'obstinait à vouloir leur faire payer le gaz trente-cinq centimes le mètre cube, les commerçants de ces deux localités, constitués en syndicat, ont fait l'acquisition d'un wagon entier de lampes, de plusieurs tonnes de pétrole et fermé impitoyablement tous les becs de leurs boutiques respectives.
Ils espèrent, de cette façon, fermer celui de la Compagnie.
On parle déjà de supprimer les petits bâtons blancs des agents et de les remplacer par des signaux pareils à ceux qui, dans les grandes gares, montrent, de loin, si une voie est libre ou occupée.
Ces signaux ont été déjà essayés à Londres, où l'on a érigé sur quelques carrefours de hauts mâts qui sont reliés par un fil électrique à un poste de surveillance spécial.
En pressant sur un bouton, le surveillant peut faire surgir en haut du mât le signal Stopp! (Arrêtez!) écrit en grosses lettres, et alors les cochers, dans les rues aboutissantes, n'ont qu'a regarder de loin ce signal pour voir s ils peuvent continuer leur course ou s'ils doivent ralentir la marche de leurs chevaux.
Naturellement, le soir, le signal se détache en-lettres transparentes sur l'horizon.
Le Bulletin municipal a publié, il y a quelques temps, l'avis relatif aux prescriptions de la loi du 22 juillet 1896 sur l'installation des pigeonniers.
A ce sujet, il .n'est pas sans intérêt de connaître le nombre de pigeons voyageurs existant à Paris et dans les communes des arrondissements de Saint-Denis et de Sceaux.
Conformément au décret du 15 septembre qui prescrit chaque année le recensement des pigeons voyageurs, ce recensement a été opéré en janvier 1896. Le résultat de cette opération vient d'être publié.
A Paris, il y a 16,364 pigeons-voyageurs se décomposant en 8,778 pigeons non entraînés et 7,586 pigeons entrainés et se répartissant entre 828 propriétaires.
Dans l'arrondissement de Saint-Denis, il y a 9,071 pigeons voyageurs 4,854 non entraînés et 4,217 entraînés, se répartissant entre 495 propriétaires.
Dans l'arrondissement de Sceaux, 369 propriétaires possèdent 4,800 pigeons dont 3,033 non entraînés et 1,677 entraînés.
Le département de la Seine possède donc 30,235 pigeons voyageurs, dont 16,665 non entraînés et 13,570 entraînés, appartenant à 1,692 propriétaires. Rappelons que la loi du 22 juillet 1896 substitue à la déclaration pure et simple, exigée sous l'ancienne législation, l'obligation pour toute personne voulant avoir un colombier, d'en obtenir préalablement l'autorisation du préfet, et pour toute personne qui reçoit un pigeon voyageur l'obligation d'en faire la déclaration à la mairie.
Comment échapper à la congestion pulmonaire et aux pneumonies infectieuses, auxquelles nous livre la malencontreuse influenza ?
En fortifiant à la fois le cœur et les poumons, en facilitant la circulation et la nutrition, répondent les docteurs les plus estimés.
C'est pourquoi le Vin Bravais à la kola, coca, guarana et cacao, est actuellement considéré comme le remède sauveur combien de -malades lui doivent leur résurrection !
Les personnes qui vont à la Comédie-Française pour voir la pièce en vogue savent trouver au célèbre restaurant du Bœuf à la mode, rue de Valois, pour ces dîners délicats servis avant le spectacle, les traditions de haute cuisine qui ont consacré la solide réputation de cette vieille et bonne maison située à deux pas de ce théâtre.
N°4 ― Le feuilleton du journal
Le prélat, sans répondre, fit quelques pas dans la bibliothèque, réfléchissant, puis sans dissimuler son ennuî :
— Le curé de Favières est trop ardent, ce n'est pas douteux, et pourtant je ne puis blâmer son zèle, puisqu'il ne s'exerce qu'au pro- fit de la Religion. Ah ! le tact ! Le tact ! Dans la situation où le clergé se trouve, c'est la première des qualités, la seule peut-être qu'il faille exiger d'un prêtre. Et voilà cet abbé Daniel qui met sens des- sus dessous tout l'arrondissement, à l'heure où nous avons besoin de temporiser, presque de nous effacer. Vous voyez ce qui se passe dans le monde politique. Les modérés sont aux prises avec les violents. Le socialisme, par son audace, essaie de donner l'illusion de la force. Soixante insurgés prétendent opprimer le pays tout entier et détruire les assises séculaires de la société française. Il ne s'écoulera pas deux ans, avant que le gouvernement débordé se voie obligé, pour se défendre, de recourir à l'influence de l'Église, qui ne lui marchandera pas ses oflices pour une œuvre de sauvetage. Il faudrait donc ne fournir aucun motif d'inquiétude, ne se prêter à aucun conflit, tout apaiser, tout calmer, tout endormir. Et c'est juste le moment que le curé choisit pour déchaîner la guerre !
— Mais, Monseigneur, ce n'est pas lui qui la déchaîne, c'est ce Lefrançois. L'abbé Daniel fait, dans son village, ce que Votre Grandeur fait dans son diocèse. Seulement, au lieu d'avoir affaire, comme vous, à des indifférents, il se heurte, lui, à des ennemis. La religion, croyez-le bien, n'a rien à voir dans l'hostilité du maire. Si vous voulez que je vous dise les raisons véritables de cette animosité, vous comprendrez que, sous peine de livrer une victime à son bour- reau, vous ne pouvez abandonner votre curé à son maire. Mais vous allez me reprocher encore de faire des cancans, aussi je m'abstiens...
L'évêque s'assit près de la table, et regardant son jeune secrétaire avec une spirituelle bonhomie :
— Il faut bien que je vous entende, maintenant, sous peine de paraître ne pas vouloir m'éclairer. Allons, parlez, puisque vous avez tant de choses à dire. Mais tâchez de n'être pas trop scandaleux.
— Monseigneur, dit l'abbé de Préfont en riant, je n'ajouterai pas aux faits, ils suffiront. Mais votre curé Daniel, comme son glorieux patron, a eu affaire aux lions dévorants, et il les a domptés par la pureté de son regard. Il a été plongé dans la fournaise et il l'a traversée sans dommage, incessit per ignés, et il ne s'est pas brûlé.
— Allons ! Vous ne prêchez pas. Épargnez-moi les citations, interrompit gaiement Mgr Espérandieu.
— Donc, Monseigneur, l’abbé Daniel est né à Beaumont. Son père était ingénieur des ponts et chaussées. Il mourut jeune encore, lorsque son fils venait de faire sa première communion, ne laissant aucune fortune à sa veuve. Mme Daniel prit des résolutions très promptes et très fermes. Elle mit le petit Paul interne au collège de Beauvais, et se retira à Berthencourt, dans une modeste maison qui lui venait de ses parents, et où elle savait pouvoir vivre avec ses très faibles ressources. Pendant que Mme Daniel cultivait son jardin et se distrayait du binage des pommes de terre par la greffe des rosiers, son fils faisait de brillantes études. C'était un cerveau bien conformé que le travail échauffait sans le lasser. C'était aussi une nature ardente et très passionnée, incapable d'indifférence. Il aimait ou détestait, sans moyen terme. Vous voyez. Monseigneur, dès le début de sa vie, il se montrait tel qu'il devait être plus tard, avec ses larges enthousiasmes, ses répugnances obstinées, tout d'une pièce, et assurément déplacé dans le siècle d'opportunisme où nous vivons. Mettez ce tempérament d'apôtre et de martyr aux prises avec les convulsions religieuses et politiques du XVè siècle, vous avez un Savonarole, peut-être un Luther. Il s'était pris d'affection pour un de ses camarades de classe, Bernard Letourneur.
— Le fils de l'ancien Président du Conseil général de l'Oise ?
— Oui, Monseigneur, le grand éleveur de Sarmonville, celui qui possédait des trotteurs si extraordinaires et qui faisait courir. Ber nard était donc un gros garçon, beau, taillé en force, très paresseux, ayant beaucoup d'argent dans sa poche, car son père avait la main large avec lui. Tout l'opposé de Paul Daniel. Et peut-être ce contraste si complet entre l'insuffisance physique de l'un et la faiblesse intellectuelle de l'autre fut-il la raison déterminante de l'affection qui unit les deux écoliers. Dans toutes les circonstances on les trouvait unis. Quand il s'agissait de se battre, c'était Letourneur qui retroussait ses manches. Quand il fallait traduire une version ou débrouiller un thème, c'était Daniel qui fouillait le dictionnaire. Ils finirent ainsi leurs études. Seulement quand il s'agit de passer des examens, chacun dut s'y présenter pour son compte, et Daniel ne put aider Letourneur. Le beau garçon resta sur le carreau, pendant que son camarade triomphait. Mais il ne lui en voulut pas de cette différence de traitement. Ses puissants pectoraux et sa haute taille le consolèrent des succès scolaires de Paul. Et, à tout considérer, si on lui eût donné le choix entre les fortes connaissances acquises par son ami et la solide charpente dont l'avait doué la nature, il est plus que probable qu'il eût préféré rester un homme superbe que de devenir un savant remarquable. Mais l'existence qui s'offrait aux deux amis devait être si différente à raison de leurs tendances et de leurs aptitudes que l'intimité presque fraternelle qui les avait unis jusqu'à ce jour cessa brusquement. Daniel entra à l'École normale et Letourneur demeura auprès de son père, dans la large et plantureuse vie que menait le riche propriétaire de Sarmonville. Pendant que Paul continuait son labeur de bénédictin et se préparait à l'agrégation de philosophie, Bernard chassait, dépensait beaucoup d'argent, et obtenait de brillants succès auprès des dames. On connaît ses bonnes fortunes. Il n'était pas très discret. J'épargnerai ce dénombrement à Votre Grandeur pour arriver plus vite au point capital de mon récit, c'est-à-dire à l'entrée de Daniel dans les ordres et à ses différends avec M. Lefrançois.