— Juger l'année littéraire ? me répond en levant les bras au ciel l'auteur des Rougon, mais, en vérité, voilà une chose qui m'inquiète. Décider quels sont les meilleurs livres de l'année, mais, cher monsieur, il faudrait avoir la prétention de les avoir tous lus, et après les avoir tous lus d'en avoir retenu — au moins le titre. — Et, bien que je m'intéresse à toutes les nouveautés littéraires, il m'est bien difficile d'avoir parcouru les productions littéraires de l'année. D'autre part comment, pris par vous au dépourvu, et n'ayant pas le temps d'une mûre réflexion, puis-je vous citer des noms et porter des jugements sans commettre des omissions forcées et dont je me désolerais ?...
— Si nous essayions quand même ? Au point de vue général, qu'est-ce qui vous a frappé dans le mouvement littéraire de l'année dernière ? Y a-t-il seulement eu un mouvement littéraire?
— Quant à cela, certainement oui. Le champ de la littérature ne saurait être mieux comparé qu'à une montagne. Au sommet, sur le plateau, ceux qui, parvenus à la perfection, continuent à avoir beaucoup de talent. Dans cette catégorie, je rangerai quelques académiciens. C'est, avant tout, la génération à laquelle j'appartiens, et qui a marché dans la peinture de la vie, dans l'observation immédiate, c'est nous autres, Flaubert, Concourt, Daudet, Bourget aussi, et moi qui avons, à la suite de Balzac, fait des romans de mœurs. Sur la montée, qu'apercevons-nous ? L'ascension de nouveaux venus–ils s'intitulent symbolistes, décadents — qui pendant les dernières dix années se sont montrés opposés à nous autres, tout en ayant produit des garçons de talent, comme ce pauvre Paul Adam, qui vient de mourir.
» Et pendant cette année 1896, que voyons-nous enfin ? Une génération qui revient à la nature et que nous autres nous ne gênons déjà plus ; c'est la génération qui est au pied de la montagne, dont je vous parlais tout à l'heure, et qui cherche à tomber les symbolistes et les décadents. Chez les symbolistes nous avons trouvé des adversaires acharnés. Pourquoi ? Parce que, chronologiquement, ils venaient immédiatement après nous, et que les lois de la nature veulent que ceux qui détiennent les places soient délogés par ceux qui viennent immédiatement après eux.
» Nous avons été les représentants du naturalisme — et aujourd'hui encore nous tenons la scène — nous avons eu comme adversaires implacables les idéalistes, ceux-ci venant immédiatement après nous; maintenant, au contraire, nous avons des disciples qui nous acceptent au moins comme ancêtres. Ceux qui les gênent, ce n'est pas nous, assurément, ce sont ceux qui arrivent immédiatement avant eux.
» Pour me résumer, je constate pour l'année 1896, dans la littérature, un retour vers la nature, la passion, l'enthousiasme et aussi vers la santé : nous avons été l'honnêteté, quoi qu'on dise. J'affirme, quant à moi, que nous vivons d'honnêteté et de santé.
» Il semble que c'est vers la santé que tend aujourd'hui la littérature après cette névrose maladive et impuissante mêlée d'occultisme, de satanisme.
— Et les œuvres en elles-mêmes, qu'en pensez-vous ?
— Voyons, réfléchissons qu'est-ce qu'il y a eu ? Bourget ? Oui, il a donné Idylle tragique. Je dirai beaucoup de bien de lui, bien que je sois gêné un peu par sa qualité d'académicien. Son livre est très bien ; la fin, surtout, en est poignante ce débat entre l'amitié et l'amour est à coup sûr une de ses meilleures pages. Sa tentative est neuve et Bourget a voulu évidemment élargir sa formule et, tout en gardant ses qualités d'analyste psychologique, il a voulu aborder le roman social et le roman de mœurs.
» Voyons, encore parmi les académiciens ? Ah ! nous avons Claretie, dont le dernier roman a fait tant de bruit : Brichanteau comédien, mais c'est une œuvre d'excellente vérité dans son comique douloureux et touchant…
» Le Coupable, de Coppée, m'a beaucoup impressionné également. Coppée ? Mais c'est un des derniers sentimentaux qui a peint l'enfance coupable et malheureuse avec son cœur et sa .pitié. C'est du socialisme sentimental, traité avec une grande franchise, et un courage dont il faut savoir gré à l'académicien. Et puis, on dira tout ce qu'on voudra sur Coppée moi, je répète que pour faire mettre dans des yeux des larmes, pour émouvoir les petits, comme il sait les émouvoir dans ses articles du Journal, il faut vraiment avoir un altruisme, une émotion communicative. Il l'a, et il la met au service de causes touchantes qu'il plaide avec beaucoup de courage, si vous Considérez sa situation d'académicien et de commandeur de la Légion d'honneur.
— Et parmi les jeunes ?
— Mais Léon Daudet est un talent des plus curieux de la nouvelle génération…
Dans Suzanne, il a pris un sujet très délicat: beaucoup de frénésie dans l'analyse. Il y a toute la partie des amours en Espagne qui est une des plus belles pages que je connaisse, une peinture d'une passion intensive. Et moi, je suis pour la passion. Je me hâte d'ajouter que son volume n'est pas du tout construit dans mes idées, et que son dénouement n'est pas dans mes vues. Cela m'inquiète un peu pour la santé de son talent que j'aime beaucoup.
» Des jeunes, des jeunes : ah ! il y a eu Pierre Louys. Je trouve son volume délicieux, bien que son originalité ne soit pas très grande. Derrière son héroïne il y a la Salammbô de Flaubert et la Thaïs d'Anatole France, il y a aussi du Théophile Gautier.
»Seulement il y a une telle candeur dans l'impureté et une simplicité de lignes tellement délicieuse que je considère cela comme de l'impureté saine. J'avoue avoir été beaucoup séduit à la lecture de son Aphrodite. Je n'aime pas beaucoup les sentiments purement modernes que Louys y a introduits ; son héros a des subtilités qui m'inquiètent mais à côté de cette critique que de choses charmantes !... Qui encore ?
»De tout cela il découle qu'en 1896, la génération de ceux qui ont atteint 50 ans continue à avoir beaucoup de talent elle est sur le plateau.
» Les symbolistes — 30 à 35 ans — sont sur la montée, eux n'ont pas été féconds en œuvres qui resteront; les « naturiens » enfin, comme les appelle G. de Bouhelier dans son Hiver en méditation, qui m'est dédié, ils ont 20 à25 ans : c'est la génération nouvelle qui entreprend l'ascension nous les gênons moins et ils marchent davantage dans la voie que nous leur avons ouverte. »
Juin
Clou lumineux du ciel, le soleil se dévisse.
Les jours à.
reculons, vont suivre l’Écrevisse
Vers le Tropique en feu qui brûle le déserte
L’été, dés le berceau, porte au flanc le Cancer.
Qu’importe ! Les
rameaux gardent leur doux concert,
Sans redouter l’hiver et son lointain
sévice.
Prairial règne aux champs pour que l’œil se ravisse,
Et donne
la cerise et la fraise au dessert.
Fin de juin, temps heureux où,
dans sa robe claire,
Aux hommes comme au ciel la beauté cherche à
plaire,
Ou la terre, par tous ses charmes, fête Dieu,
Où, le
grand Prix couru, vers de riantes plages,
Sur de rapides chars au
trépidant essieu,
Vont les oiseaux mondains aux caprices volages.
CH. VINCENT
Magasin Pittoresque - 1906
VOILA LES GENDARMES !
LE MAGISTRAT, s'essuyant le front
avec son mouchoir. Ah docteur. Je vous attendais avec une impatience
LE
DOCTEUR, froidement. Hé! qu'y a-t-il, mon ami?
LE MAGISTRAT. J'ai cru que
vous n'arriveriez jamais. Enfin vous voilà.
LE DOCTEUR, toujours avec la
plus grande froideur. Vous désirez ?
LE MAGISTRAT. Ma malheureuse femme
souffre horriblement. Les douleurs l'ont prise, il y a une heure. Je ne sais
plus où donner de la tête.
LE DOCTEUR. De quelles douleurs parlez- vous, mon
cher ami? Des douleurs de l'enfantement, peut-être ?
LE MAGISTRAT. Oui.
c'est affreux ! Vous comprenez, la première fois.
LE DOCTEUR, de plus en
plus flegmatique. Tout cela n'est pas grave.
LE MAGISTRAT. Je vous en
supplie, docteur, hâtez-vous. (On entend des cris partant d'une chambre
voisine). Ah! mon Dieu ! Ces cris. Venez vite.
LE DOCTEUR. Nous avons bien
le temps.
LE MAGISTRAT. Oh docteur. Que dites-vous ?
LE DOCTEUR. Vous
êtes peut-être pressé, mon cher ami. Mais moi, je ne le suis pas. Madame votre
épouse souffre beaucoup en ce moment-ci, je veux bien le croire, mais vous
conviendrez que je suis, de mon côté, dans une situation des plus délicates.
LE MAGISTRAT. Vous ?
LE DOCTEUR. Parfaitement. Je ne tiens pas à être
condamné, en cas de malheur, à trois mois de prison, même avec application de la
loi Bérenger.
LE MAGISTRAT. Par pitié, docteur. Entendez les cris de cette
pauvre femme.
LE DOCTEUR. Ils sont affreux, je le reconnais. Mais trois mois
de prison sont également une chose affreuse. Que deviendrai-je si je perds ma
clientèle ? Moi aussi, j'ai une femme.
LE MAGISTRAT. Voulez-vous que je me
jette à vos pieds ?
LE DOCTEUR. Je suis très embarrassé, je l'avoue.
LE
MAGISTRAT, suppliant. Oh !
LE DOCTEUR. Je veux bien m'occuper de votre femme.
Mais vous allez m'écrire une lettre dans laquelle vous vous engagerez à ne pas
me poursuivre s'il arrive un malheur.
LE MAGISTRAT. Je vous l'écrirai, je
vous le promets.
LE DOCTEUR. Ecrivez d'abord. Vous ne trouverez plus
aujourd'hui un seul médecin qui accouchera la femme d'un magistrat sans de
bonnes garanties.
Alfred Capus.
Le Figaro - 24 octobre 1897
NI CRAMPES, NI DOULEURS
L’ingestion des eaux purgatives cause généralernent des douleurs et des crampes intestinales. L’Apenta, plus douce que les autres eaux amères, et contenant moins de sulfite de chaux et pas de chlorure de magnésium, n’offre pas cet incovénient et doit leur être préférée. C’est l’opinion des savants de tous le pays, Paris, à Londres, à Berlin, et plus récemment, à Moscou, l’Apenta a été placée au premier rang des eaux purgatives. (Rapport du Dr Bogoslowsky, professeur à l’Université Impériale.)
MÉDECINE
LE VIN DONNE-T-IL
DE LA FORCE ?
Les gens qui boivent, mangent peu. « L'alcool soutient », disent les buveurs.
Il est de fait que ceux qui font grand usage des boissons fermentées ont leur
digestion très ralentie. Quand on boit de l'eau, la digestion est autrement
rapide. L'estomac ne manque pas de vous en prévenir. On a faim trois où quatre
heures après le repas. Les gens qui raisonnent mal en concluent naturellement
que le vin les nourrit et que l'eau fraîche ne les soutient pas. L'illusion est
complète. C'est un peu comme si l'on prétendait qu'un foyer de chaleur, un
poêle, une cheminée fonctionnent mieux quand la combustion est ralentie et dure
plus longtemps. Oui, elle dure plus longtemps, mais elle ne fournit pas de
calorique ; encore un peu, elle s'éteindrait. La cellule animale n'a pas été
créée pour être gorgée d'alcool ; pour qu'elle reste dans son état normal, il
lui faut de l'eau. Autrement, sa fonction est entravée. C'est pourquoi
l'organisme, imprégné d'alcool, se trouve dans une situation morbide. Alors se
déclarent les maladies par ralentissement de la nutrition, et apparaissent leurs
symptômes caractéristiques : obésité, gravelle, rhumatismes, etc. De sorte que
cette fausse idée des boissons qui « soutiennent » conduit directement à une
transformation néfaste de la fonction, à une diminution des forces et à une
altération de la santé. Qui digère lentement sous l'influence de l'alcool,
perturbateur de la nutrition, est déjà un malade. Celui-là a grand besoin d'eau,
un remède meilleur que celui des pharmaciens.
Est-ce exact que l'alcool
ralentit la nutrition cellulaire et générale ? L'observation le démontre
largement. L'expérience aussi. MM. Chittender et Mendel, de Yale University,
viennent encore de faire voir, en opérant in vitro, que les boissons fermentées
retardent les processus chimiques de la digestion. Ils ont directement mis en
contact des substances alimentaires avec des liquides digestifs. Dès qu'on
ajoute aux liquides digestifs 2% d'alcool, l'activité digestive est enrayée. Le
whisky pur, qui renfermé environ 50 % d'alcool, mélangé à la dose de 1 %
seulement aux sucs digestifs, réduit de plus de 6 % le temps de la digestion.
Dans quelques cas cependant, l'action a été nulle. N'importe, le fait n'est pas
douteux, et nous l'avons constaté il y a plus de vingt-cinq ans avec le docteur
Corvisart. L'alcool retarde les phénomènes d'assimilation, et, si l'on s'imagine
que le vin, les liqueurs fortes, soutiennent, c'est uniquement, d'abord, parce
que ces boissons excitent le système nerveux, et semblent donner des forces, et,
ensuite, parce que le sentiment de la faim est retardé par cela même que la
nutrition est entravée. Mais résultat final : altération de la nutrition et
maladies qui en sont la conséquence. Défiez-vous du petit verre, surtout vous
qui habitez la ville au milieu d'une atmosphère impure !
Henri de Parville
APL - mars 1897
En hiver, un médicament qui empêcherait sûrement de tousser et de s'enrhumer serait un grand bienfait pour tous. Pour se guérir et se préserver des rhumes, toux, bronchites, catarrhes, asthme, grippe pour se fortifier les bronches, l'estomac et la poitrine, il suffit de prendre à chaque repas deux « Gouttes Livoniennes de Trouette-Perret », et ce médicament, si peu coûteux, qui se vend trois francs le flacon de soixante petites capsules dans toutes les bonnes pharmacies, suffit toujours pour enrayer le mal. Bien prendre note que ce médicament ne se détaille pas, et se vend en flacons cachetés, avec le nom « Gouttes Livoniennes de Trouette-Perret », et le timbre de garantie de l'Union des fabricants pour la répression de la contrefaçon. »