Deux jours avant d'entrer dans le cabinet Méline, M. Milliard, qui ne se
doutait pas qu'il deviendrait garde des sceaux, avait lancé des invitations
pour un grand bal fixé au 18 décembre. Depuis l'année dernière, en effet, M.
et Mme Milliard ont organisé des réceptions très brillantes à l'occasion de-rentrée
dans le monde de leurs deux filles.
Malgré son changement de situation M.
Milliard a maintenu ses invitations; le bal aura lieu non au ministère de la
justice, mais au domicile personnel du nouveau garde des sceaux, 131, rue du
Faubourg-Saint-Honore.
Quoique très assidu dans l'exercice de ses devoirs parlementaires, M. Paul Deschanel ne néglige pas ceux d'écrivain. L'éloquent député d'Eure-et-Loir se consacre à la fois à la politique, à l'économie sociale et aux lettres pures. M. Deschanel est en train de recueillir et de coordonner lès nombreux articles de journaux ou de revues qu'il a publiés sur ces différents sujets, en vue de les faire paraître en volumes. Il y aura même dans ces volumes quelques travaux littéraires inédits qui seront un vrai régal pour les lecteurs.
Le baron de Clumecky, conseiller intime de l'empereur d'Autriche, membre de la Chambre des seigneurs autrichiens, directeur des Chemins de fer du sud de l'Autriche, arrivé à Paris, est descendu à l'hôtel Vouillemont.
Dans les contes qui ont amusé notre enfance et dans les fééries qui nous amusent, grands ou petits, il y a toujours une méchante fée, oubliée dans les invitations du baptême et qui poursuit de sa rancune le pauvre prince ou l'innocente princesse. Pendant toute la durée du conte ou de la pièce, le bon génie combat la méchante fée et finit par avoir le dessus.
Il semble que, depuis quelques années, nous assistons à pareille chose, à propos de la légendaire « trêve des confiseurs ». La fée Rageuse s'évertue à susciter des évènements pour troubler la tranquillité de cette époque heureuse. Une année, c'est l'influenza une autre année, un krach, puis les bombes anarchistes, le Panama, l'affaire Dreyfus, toujours la mauvaise fée ennemie jurée des étrennes. Heureusement que le bon génie est là et ce bon génie c'est Pihan. Il entreprend la lutte, sûr de vaincre, car il a pour lui le bouclier magique qui défie tous les maléfices. Et grâce à son courage, à son intelligence, à ses merveilleux et artistiques tours de force, il gagne chaque année la bataille .et sauve, la trêve des confiseurs.
L'année dernière, tout Paris s'est arraché aux préoccupations politiques pour aller rue du Faubourg-Saint-Honoré, contempler et admirer les jolis sacs La Vallière, Richelieu, Mazarin, les bourses Colbert, les jardinières Montespan, les ombrelles Charmeuse, les corbeilles Olga, Tzarine, Princesse de Galles, et toutes ces adorables créations au milieu desquelles on était ébloui, ne sachant laquelle choisir. Cette année, on aura peine à le croire, c'est mieux encore. Oui, mieux. Car aux merveilles de l'année précédente, dont les dentelles et les plumes, dans leurs ingénieuses combinaisons, font le principal ornement, Pihan, artiste aux ressources inépuisables, a joint, pour l'exposition qui commence aujourd'hui, les applications de broderie et de passementerie d'or et d'argent sur les velours et les satins aux tons tendres ou vifs, harmonieusement associés ou opposés, reposant l'œil après l'avoir frappé, le charmant toujours et quand même.
Quand on entrera dans les magasins du faubourg Saint-Honoré, on pourra se croire dans cette fameuse grotte des Mille et une Nuits où les pierres précieuses de tous les pays du monde étincelaient à la lueur de la lampe d'Aladin. Mieux encore, car au lieu de la modeste et rudimentaire lampe, on aura les flots de lumière électrique.
Que les merveilles destinées à contenir les bonbons ne nous fassent, pas oublier les bonbons eux-mêmes, cet autre triomphe du grand chocolatier parisien. Mais pourquoi, essayer de les vanter ? Leur éloge n'est-il pas dans toutes les bouches ? Allons, rassurons-nous. Grâce à Pihan, nous aurons encore cette année, et quoi qu'il puisse arriver, une belle et bonne trêve des confiseurs.
C. Duhamel.
Le Figaro – 6 décembre 1897
Les savants ont longuement recherché en ces dernières années quelles étaient les causes et les origines de l'anthropophagie, dont les horribles coutumes subsistent encore puisque, il y a deux ou trois ans, un de nos compatriotes était dévoré par les indigènes de la côte de Guinée.
Les Américains ne se contentèrent jamais d'avoir des théories originales sur la vie, ils y ajoutent souvent encore des idées bizarres sur la mort. Depuis longtemps, ils se sont d'ailleurs préoccupés de ce problème macabre, mais intéressant comment il convient d'exécuter les condamnés a mort en leur imposant le minimum de souffrance, Et ils sont toujours la recherche du mode d'exécution le plus propre et le plus rapide.
Le Carnaval, heureusement restauré, a retrouvé son succès légendaire. Paris, sur un vaste espace, l'a acclamé dans son joyeux cortège. On a fait fête aux chicards flambants, aux pierrots roses si gracieux. Et ce fut un éclat de rire quand parut Messire Carnaval, ronde majesté, monté sur un vélo, en homme qui sait ce qu'il doit à l'automobilisme.
Une malheureuse femme, Mme veuve Huve, âgée de quarante-huit ans et domiciliée en dernier lieu rue de Flandre, est atteinte, depuis près d'un an, d'ataxie locomotrice. Comme elle se trouve dans l'impossibilité de gagner sa vie, elle s'était fait conduire, hier, à l'hôpital Laennec mais, malgré ses supplications, on refusa de la recevoir.
Les braconniers d'eau douce donnent, depuis quelques jours, de la besogne aux agents de l'autorité.