Dans l'actualité des ...
Dans l'après-midi d'hier, à quatre heures, le président de la République a reçu le duc de Cambridge, cousin de la reine d'Angleterre, et lui a rendu sa visite à cinq' heures et demie.
Entre temps, MM. Édouard Hervé, directeur, Anatole France, chancelier, et Gaston Boissier, secrétaire perpétuel de l'Académie française, avaient présenté à M. Félix Faure le marquis Costa de Beauregard, élu membre de la Compagnie le 28 février dernier.
Si les rois, jadis, épousaient des bergères, les. princesses, aujourd'hui, préfèrent les Millionnaires.
D'après le World, il serait question, à Londres, d'un prochain mariage entre la princesse Victoria, seconde fille du prince de Galles, seule de ses enfants qui ne soit pas mariée, et le richissime Américain, M. William Astor, propriétaire de la Pall Mall Gazette, lequel serait, pour l'occasion, créé duc.
Le nouvel époux deviendrait ainsi le beau-frère du duc de Fife, marié à l'aînée des filles du « Prince of Wales », qui descendant d'une famille Duff, ne fut créé comte du Royaume-Uni qu'en 1885 et, duc qu'eu 1889.
Plus que jamais Madagascar est d'actualité. L'exil de la reine, les complots anglo-protestants, le débat engagé devant les Chambres, rendent indispensable la lecture du curieux et précieux volume de notre confrère Émile Blavet « Au Pays malgache », qui continue à s'enlever en librairie.
Par décret du mikado, empereur du Japon le président de la République reçoit le grand-cordon de l'ordre du Chrysanthème; M. Hanotaux, l'amiral de Beaumont, commandant, l'escadre française d'Extrême-Orient, et le général de Boisdeffre sont nommés grand-croix du Soleil levant, et, enfin, l'amiral Sallandrouze de Lamornaix grand-cordon du Trésor sacré.
Des dépêches du parquet de Charleville signalent aux commissaires spéciaux des gares de chemins de fer A Paris la fugue de deux collégiens appartenant à d'honorables familles de cette ville.
Ces deux jeunes gens, André Siméoni, dix-sept ans, et Louis Becquart, quinze ans, ont réussi, on ne sait comment, à se procurer une somme de 500 francs et, avant de partir, samedi soir, ont raconté qu'ils avaient l'intention d'aller s'embarquer a Marseille à destination de Madagascar.
Un vieillard de soixante ans, Jean Gallier, nettoyeur de rails, a été victime, avant-hier, après midi, rue du Faubourg-Saint-Antoine, d'un accident qui a eu pour lui les plus funestes conséquences.
Ce pauvre homme poussait devant lui l'instrument servant à nettoyer l'intérieur des rails, lorsqu'arriva sur lui le tramway faisant le trajet du Louvre' à Vincennes. Le malheureux, qui était très sourd, n'entendit pas les appels de la trompe. Le cocher ne put arrêter à temps son attelage et le vieillard, renversé par le timon, eut la jambe droite broyée au-dessus du genou par les roues de la lourde voiture.
Gallier fut transporté à l'hôpital Saint-Antoine où l'amputation fut pratiquée sur-le-champ. Quelques heures plus tard; il rendait le dernier soupir.
Demain jeudi, de 3 h. à 6 h., concert dans la salle des fêtes des Grands Magasins Dufayel. Séance du Cinématographe Lumière. Tableaux animés et scènes parlées par M. Darthenay. Il sera offert à toute personne assistant à une séance un étui de Suprêmes Pernot. Exposition de mobiliers par milliers toujours prêts à être livrés, articles de chauffage, de ménage, literie, articles de jardin, etc., etc. Le succès toujours croissant de cet établissement est dû à la bonne qualité et au bon marché exceptionnel de ses marchandises.
Rouen. Nansen est arrivé aujourd'hui, à 3 h. 1/2, désireux, a-t-il dit en acceptant l'invitation de la Société de géographie, de renouer connaissance avec « ses cousins les Normands ».
L'explorateur a été reçu officiellement à la gare par la municipalité et par le consul de Suède et Norvège. La foule l'a acclamé sur tout le parcours de la gare à l'Hôtel de Ville.
Après une courte réception à la mairie, Nansen a visité, le palais de Justice, la statue de Rollon, la Grosse Horloge, où les enfants des écoles ont poussé des hourras, et enfin la cathédrale où il a été reçu par Mgr Sourrieu, archevêque de Rouen, Des bouquets ont été offerts a Mme Nansen. Dans la soirée, le Tout-Rouen avait envahi le théâtre pour écouter la conférence de l'orateur qui, au milieu d'applaudissements enthousiastes, a raconté son voyage au pôle Nord.
Voilà le programme du toni-nutritif digne de ce nom. Ce programme a été fort bien rempli, de nos jours, par le Vin Désiles, dont tous les principes reconstituants et revivifiants se pénètrent, s'équilibrent et se pondèrent par une association scientifiquement antidiathésique. Dans tous les dépérissements chroniques, dans les anémies graves, dans les bronchites anciennes, d'une si désespérante ténacité, l'emploi du Vin Désiles vient à la rescousse des médications spécifiques. Employé seul, à la dose de deux verres à madère chaque jour, le Vin Désiles ranime les nutritions défaillantes ou incomplètes. La maigreur et la pâleur des enfants, les palpitations et les retards de la jeune fille, les crampes d'estomac réfractaires aux meilleurs traitements, le vice lymphatique ou chloro-anémique, qui sert de tremplin aux évolutions des plus graves maladies constitutionnelles, trouvent dans le toni-nutritif moderne un précieux médicament-aliment.
Accompagné du ministre du commerce, du général Tournier et de M. Blondel, le président de la République, qui fut longtemps membre du conseil de perfectionnement du Conservatoire des Arts et Métiers, s'y est rendu hier soir à neuf heures et demi, à l'improviste, afin d'assister au cours de M. Yungfleisch, sur la chimie agricole dans ses rapports avec l'industrie.
Les membres de la colonie mauricienne doivent offrir, mercredi prochain, au restaurant Marguery, un banquet à sir Charles Bruce, qui vient d'être nommé gouverneur de l'ile Maurice.
A partir de lundi prochain 5 avril, les musées du Luxembourg et du Louvre seront ouverts de neuf à cinq heures; les manufactures de Sèvres et des Gobelins, de midi à cinq heures; les musées de Cluny et de Versailles, de onze heures à cinq.
Lundi prochain, probablement, sera soumis au conseil municipal le rapport de M. Caplain, tendant à donner des noms aux nouvelles rues de Paris.
Contrairement à l'avis de l'administration des Postes, qui repousse, par crainte de confusion dans les distributions des lettres, les noms de villes françaises, la nouvelle partie de la rue Mouffetard s'appellera rue Bazeilles. La voie récemment ouverte de la rue Condorcet à la rue Pétrelle sera baptisée rue Lentonnet, du nom du lieutenant-colonel mort à Madagascar le prolongement de la rue du Conservatoire deviendra rue Ambroise-Thomas.
Sur la proposition de M. Caplain, la commission a décidé que les dates de naissance, de décès et les professions des personnages jugés dignes des honneurs municipaux seraient inscrites sur les nouvelles plaques.
Rappelons, à ce propos, que l'apposition de ces rectangles émaillés représente une dépense annuelle de six mille francs.
Le Journal des Sports, tel est le nouveau titre adopté, à partir d'aujourd'hui, par notre confrère Paris-Vélo. L'extension considérable prise par les différentes branches de sport justifie cet heureux changement, et, pour satisfaire aux exigences d'une clientèle toujours plus nombreuse, notre confrère publie chaque jour plusieurs éditions, afin d'arriver bon premier dans toute la France, avec les dernières informations sportives du monde entier. Signe des temps Qui eût prévu qu'un journal de sports arriverait à faire paraître plusieurs éditions chaque jour!
M. Lépine, préfet de police, a présidé, hier soir, le banquet de l'Association des Lyonnais, Des toasts ont été portés, au champagne, par MM. Charavay, Pierre Nicolas, Fleury-Ravarin, député. Le diner a été suivi d'un concert.
Le banquet annuel de l'École d'horlogerie de Paris aura lieu dimanche, prochain 4 avril, dans les salons de l'hôtel Continental, sous la présidence de M. Boucher, ministre du commerce.
N°4 ― Le feuilleton du journal
Le prélat, sans répondre, fit quelques pas dans la bibliothèque, réfléchissant, puis sans dissimuler son ennuî :
— Le curé de Favières est trop ardent, ce n'est pas douteux, et pourtant je ne puis blâmer son zèle, puisqu'il ne s'exerce qu'au pro- fit de la Religion. Ah ! le tact ! Le tact ! Dans la situation où le clergé se trouve, c'est la première des qualités, la seule peut-être qu'il faille exiger d'un prêtre. Et voilà cet abbé Daniel qui met sens des- sus dessous tout l'arrondissement, à l'heure où nous avons besoin de temporiser, presque de nous effacer. Vous voyez ce qui se passe dans le monde politique. Les modérés sont aux prises avec les violents. Le socialisme, par son audace, essaie de donner l'illusion de la force. Soixante insurgés prétendent opprimer le pays tout entier et détruire les assises séculaires de la société française. Il ne s'écoulera pas deux ans, avant que le gouvernement débordé se voie obligé, pour se défendre, de recourir à l'influence de l'Église, qui ne lui marchandera pas ses oflices pour une œuvre de sauvetage. Il faudrait donc ne fournir aucun motif d'inquiétude, ne se prêter à aucun conflit, tout apaiser, tout calmer, tout endormir. Et c'est juste le moment que le curé choisit pour déchaîner la guerre !
— Mais, Monseigneur, ce n'est pas lui qui la déchaîne, c'est ce Lefrançois. L'abbé Daniel fait, dans son village, ce que Votre Grandeur fait dans son diocèse. Seulement, au lieu d'avoir affaire, comme vous, à des indifférents, il se heurte, lui, à des ennemis. La religion, croyez-le bien, n'a rien à voir dans l'hostilité du maire. Si vous voulez que je vous dise les raisons véritables de cette animosité, vous comprendrez que, sous peine de livrer une victime à son bour- reau, vous ne pouvez abandonner votre curé à son maire. Mais vous allez me reprocher encore de faire des cancans, aussi je m'abstiens...
L'évêque s'assit près de la table, et regardant son jeune secrétaire avec une spirituelle bonhomie :
— Il faut bien que je vous entende, maintenant, sous peine de paraître ne pas vouloir m'éclairer. Allons, parlez, puisque vous avez tant de choses à dire. Mais tâchez de n'être pas trop scandaleux.
— Monseigneur, dit l'abbé de Préfont en riant, je n'ajouterai pas aux faits, ils suffiront. Mais votre curé Daniel, comme son glorieux patron, a eu affaire aux lions dévorants, et il les a domptés par la pureté de son regard. Il a été plongé dans la fournaise et il l'a traversée sans dommage, incessit per ignés, et il ne s'est pas brûlé.
— Allons ! Vous ne prêchez pas. Épargnez-moi les citations, interrompit gaiement Mgr Espérandieu.
— Donc, Monseigneur, l’abbé Daniel est né à Beaumont. Son père était ingénieur des ponts et chaussées. Il mourut jeune encore, lorsque son fils venait de faire sa première communion, ne laissant aucune fortune à sa veuve. Mme Daniel prit des résolutions très promptes et très fermes. Elle mit le petit Paul interne au collège de Beauvais, et se retira à Berthencourt, dans une modeste maison qui lui venait de ses parents, et où elle savait pouvoir vivre avec ses très faibles ressources. Pendant que Mme Daniel cultivait son jardin et se distrayait du binage des pommes de terre par la greffe des rosiers, son fils faisait de brillantes études. C'était un cerveau bien conformé que le travail échauffait sans le lasser. C'était aussi une nature ardente et très passionnée, incapable d'indifférence. Il aimait ou détestait, sans moyen terme. Vous voyez. Monseigneur, dès le début de sa vie, il se montrait tel qu'il devait être plus tard, avec ses larges enthousiasmes, ses répugnances obstinées, tout d'une pièce, et assurément déplacé dans le siècle d'opportunisme où nous vivons. Mettez ce tempérament d'apôtre et de martyr aux prises avec les convulsions religieuses et politiques du XVè siècle, vous avez un Savonarole, peut-être un Luther. Il s'était pris d'affection pour un de ses camarades de classe, Bernard Letourneur.
— Le fils de l'ancien Président du Conseil général de l'Oise ?
— Oui, Monseigneur, le grand éleveur de Sarmonville, celui qui possédait des trotteurs si extraordinaires et qui faisait courir. Ber nard était donc un gros garçon, beau, taillé en force, très paresseux, ayant beaucoup d'argent dans sa poche, car son père avait la main large avec lui. Tout l'opposé de Paul Daniel. Et peut-être ce contraste si complet entre l'insuffisance physique de l'un et la faiblesse intellectuelle de l'autre fut-il la raison déterminante de l'affection qui unit les deux écoliers. Dans toutes les circonstances on les trouvait unis. Quand il s'agissait de se battre, c'était Letourneur qui retroussait ses manches. Quand il fallait traduire une version ou débrouiller un thème, c'était Daniel qui fouillait le dictionnaire. Ils finirent ainsi leurs études. Seulement quand il s'agit de passer des examens, chacun dut s'y présenter pour son compte, et Daniel ne put aider Letourneur. Le beau garçon resta sur le carreau, pendant que son camarade triomphait. Mais il ne lui en voulut pas de cette différence de traitement. Ses puissants pectoraux et sa haute taille le consolèrent des succès scolaires de Paul. Et, à tout considérer, si on lui eût donné le choix entre les fortes connaissances acquises par son ami et la solide charpente dont l'avait doué la nature, il est plus que probable qu'il eût préféré rester un homme superbe que de devenir un savant remarquable. Mais l'existence qui s'offrait aux deux amis devait être si différente à raison de leurs tendances et de leurs aptitudes que l'intimité presque fraternelle qui les avait unis jusqu'à ce jour cessa brusquement. Daniel entra à l'École normale et Letourneur demeura auprès de son père, dans la large et plantureuse vie que menait le riche propriétaire de Sarmonville. Pendant que Paul continuait son labeur de bénédictin et se préparait à l'agrégation de philosophie, Bernard chassait, dépensait beaucoup d'argent, et obtenait de brillants succès auprès des dames. On connaît ses bonnes fortunes. Il n'était pas très discret. J'épargnerai ce dénombrement à Votre Grandeur pour arriver plus vite au point capital de mon récit, c'est-à-dire à l'entrée de Daniel dans les ordres et à ses différends avec M. Lefrançois.